93 NKM ? On aimerait, ça ferait vraiment peuple... Seulement voilà : depuis son départ du fauteuil de l’Agriculture, Nathalie Kosciusko‐Morizet lanterne seule dans l’escalier de service de l’hypercandidat avec dans sa besace, une bardée de diplômes, un look longiligne qui sent les années de labeur passées sur un piano à queue à rabâcher des concerti de Scriabine et un passé de bourgeoise qui lui fait dire qu’« un Ministre prend rarement le métro ». Ah bon ? Pour la porte‐parole d’un candidat se disant "du peuple" : pas terrible. Elle aurait pu se rattraper sur la com’, mais là encore, boulette. La semaine dernière, en 13 minutes, elle aligne devant un gisement de journalistes peu enthousiastes les mesures économiques de François Hollande en démontrant chiffre après chiffre la déficience de ses propositions.
En un mot : c’est chiant. On eût ri de quelques tâcles, fussent‐ils pesés.
Si ! Un seul, mais il faut se gratter pour rire : avec Hollande, le changement, c’est maintenant. Et NKM de ruser : "le changement, c’est tout le temps". Sourire de Madame Morizet, pincé, se remettant le cheveu frisé derrière l’oreille, et ça ne bronche pas dans la salle : la crampe. Le souci de Madame Morizet est double : c’est elle, d’une part, elle dans l’image déconnectée de la base qu’elle arbore face à des caméras qui absorbent son maquillage funèbre ; c’est son prophète d’autre part, qu’elle n’a pas accompagné à Bayonne, le laissant aller se faire caillasser tandis qu’elle se morfondait dans un cagibi du XVème à ressasser des dossiers pourrissant dans une armoire de ce QG vide. Comme porte‐parole, d’autres chiennes de garde auraient été plus téméraires, car sa Sainteté, s’il avait voulu cogner, eût choisi Morano pour servir de bouclier aux jets de pierres bayonnaises : mais en ces temps où les aboiements commencent à étourdir le peuple, la prudence est de mise. Seulement, la Morizet, atout chic, ne prend pas, malgré sa silhouette de fin de dernier acte tragique : pas de premier prix de mise en scène politique et sur ce plan, elle mourra seule (c’est une image), dans son bureau, comme Phèdre entre deux colonnes, rendant aux jours la pureté que son regard souillait. Pour le coup, le père Wauquiez et sa droite sociale seraient mieux passés, mais là encore, s’étant tiré à soi la couverture dans la tornade Lejaby, ça n’a pas plu, sa Sainteté s’est trop vue dans l’ombre. Exit Laurent : projo sur une polytechnicienne (ou énarque, un truc dans le genre) dont les convictions ont montré leurs limites dans la volonté de démocratiser l’accès aux outils multimédias au sein des élites (beurk).
On voit déjà Raffarin maniant la souris, comme en son temps, avec sa sympathie maladroitière, le très gauche Chirac. NKM seule donc, et même toute seule. Il doit aussi y avoir de sa volonté à elle dans cette posture altière et gaulienne, voire néo‐romantique de celle qui va là, yeux fixés sur ses pensées, sans rien voir au dehors gnagnagna etc... Mais pourquoi ? Pourquoi Sarko l’a‐t‐il laissé faire ? Pourquoi, oui, pourquoi ce geste, lui qui maintenant est contraint de la faire surveiller, la fourbir de conseillers limitant ses prises de parole ?
Pour la journée des femmes, c’est une image de fin de partie que NKM donnait à voir avec des scories exhalant la démocratie conformiste, genre "en tant que femme, et mère, et femme politique, et femme de conviction blablabla". Nathalie, oui, je m’adresse à toi et tes longues étoles noires du haut desquelles viennent se mourir quelques cheveux mal attachés, ainsi des lierres caressant un fard marbré, Nathalie, oui, j’aimais cette allure de bobo de droite qui sournoisement t’emmène — comme je suis triste dans l’antichambre du déclin et j’ai lu tous les livres ! —, désormais. Toi qui ne veux ternir cette image de bonne élève, la première de promo, la tête de classement, épouse sans doute modèle, avec ce rien de relâchement dans ton phrasé à demi articulé, oui, Nathalie, les moments te sont chers, les jours te sont comptés, et mon coeur, s’égare. Rideau.