MÉTAPHYSIQUE III - 3ème partie.
Les nouvelles armes du totalitarisme d’aujourd’hui

Suite et fin de Métaphysique III

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Métaphysique III 3ème partie.

Les nouvelles armes du totalitarisme d’aujourd’hui

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L’IA : la métastase numérique ou l’algorithme souverain

Petite histoire d’une externalisation métastasique.

« Le premier caractère évident du phénomène technique est celui de la rationalité… Toute intervention de la technique, en effet, opère une réduction au schéma logique, des faits, des pulsions, des phénomènes, des moyens et des fins. »

Jacques ELLUL, La Technique ou l’enjeu du siècle, A. Colin, 1954, pages 73-4.

L’IA n’apparaît pas ex nihilo, elle est le fruit d’une longue maturation. Les brutales accélérations des dernières décennies préparent le SEN (Saint-Empire Numérique) et nous réservent bien d’autres surprises, si l’effondrement de la T-S ne remet pas les compteurs à zéro.

Connait-on vraiment ce que l’on fabrique ? Connait-on vraiment ce que l’on utilise ? Cette double question résume parfaitement le syndrome de la poule devant une brosse à dents. Chaque nouvel artefact issu de notre intelligence collective cache les "acquis" devenus inconscients de l’histoire de la T-S. L’IA n’échappe pas à cette constatation.

Par ailleurs, difficile de ne pas croire que nous sommes comme un train dont les rails mènent à un futur imprévisible à partir d’un passé de plus en plus méconnaissable. Commençons, donc par un bref rappel des objets techniques préalables à l’IA

Les premiers artéfacts calculateurs.

Cette citation du logicien Alan Turing (1950) donne le ton à des décennies d’euphorie machinique.

Les ancêtres.

L’odomètre des arpenteurs-géomètres. (Archimède, Vitruse).
La machine d’Anticythère pour les calculs astronomiques (-87).
L’astrolabe à partir du XIIème siècle révolutionne la navigation.
Le podomètre pour compter le nombre de pas d’un cheval ou d’un homme (1525).

Début de la modernité.

La Pascaline inventée par Blaise Pascal en 1645 fut un des premiers calculateurs arithmétiques. C’est le début de l’apogée de la mécanique à l’origine de beaucoup de machines. La pensée analogique voit une première réalisation convaincante.

Le cylindre cannelé de Leibniz (1671) élargit les prouesses de la mécanique : automates, horloges astronomiques. La véritable machine à calculer devient possible fin du XVIIème.

Babbage (1791-1871) franchit une étape décisive dans la longue transformation du calculateur vers l’informatique. La lecture de sa biographie (Wikipédia par ex.) montre la puissance de son génie mathématique et d’ingénieur en mécanique. Sa machine s’inspire des logarithmes de Neper qui transforment n’importe quelle opération en additions progressives où la mémoire du résultats précédents entre en jeu dans l’addition précédente si bien que le logarithme est mécanisante : la machine à différences. Cette machine (deuxième version) comporte 8 000 pièces, mesure quatre mètres de long et pèse onze tonnes. Que l’on pense au microprocesseur d’ ordinateur actuel et sa puissance de calcul et de stockage : on comprend l’accélération prodigieuse accomplie et la démocratisation induite qui fascine et transforme le QI de nos concitoyens.
Ensuite, Babbage invente la machine analytique, la machine qui ne sert à rien, du moins qu’à elle-même. Cette machine change de nature, de bêtement mécanique, elle "sait" ce qui se passe dans ses entrailles : une roue est bloquée ou non. Naissance de l’univers du 0-1 indispensable à nos artéfacts actuels. De mécanique cette machine devient organique. Elle pense en elle-même. Toutes ses opérations se réduisent à manipuler des data.

Ada Lovelace, élève de Babbage et fille de Byron, (Ada devient le nom d’un langage informatique) développa l’idée de programme remplaçant celle de calcul. Après elle, George Boole mit au point une logique formelle (l’algèbre de Boole). L’informatique n’est plus calcul, mais programme. Les grands mathématiciens suivants (Boole, Russel, Hilbert, Cantor) s’attaquèrent à développer cette logique.
Gödel montre que cette méthode qui laissait espérer une connaissance totale du monde a des limites. Il démontre que la rationalité est bornée de l’intérieur par ses propres prémisses.
Alan Turing décrypte la machine à coder "Enigma" des Allemands, et Norbert Wiener accélèrent le passage vers la cybernétique et l’intelligence artificielle [1].

Algorithme, l’ataraxie indolore ou le paradis artificiel.

    • Étrange destin d’un mathématicien perse du IXème siècle - ’Al-Khwârizmî - dont la latinisation du nom donna algorithme, à l’origine de l’algèbre et de l’introduction du zéro indien dans les calculs.
    • L’algorithme est une succession de lignes de code destinées à établir un "programme" défini de calcul, de stockage de data et d’affichage des résultats sur les écrans de nos outils. Il se mesure en octets et peut se rédiger dans différents langages qui seront ensuite compilés en langage machine, celui du processeur.
    • Le poids de l’algorithme dépend de la puissance de la machine. Via les réseaux, il communique à travers les méandres de la "toile".
    • Une erreur d’écriture dans le code génère le fameux bug. (Si vous prononcez bogue attention cela pique, cf. la célèbre châtaigne des électriciens).
  • Algo toujours…
    • La numérisation passe par la croissance exponentielle des algorithmes en nombre et en complexité. Le temps des bricoleurs terminé, place aux "programmeurs", la nouvelle race d’archiprêtres du cyberespace.
    • Le calcul devenu série d’instructions exécutables qui portent en elles une optimisation du temps d’exécution pour résoudre le problème donné. Le meilleur algorithme est donc celui qui, à moindre octets, parvient au résultat souhaité.
    • Il s’appuie sur le travail incessant des maths appliquées et de la logique.
    • Il décortique le réel de la problématique en séquences, boucles, mises en mémoires de résultats partiels en vue de reprendre sa progression.
    • Tout algorithme est combinaison d’opérations élémentaires choisies dans un répertoire restreint. Le calcul devient une catégorie objective de la pensée humaine inventive.
    • Il forme une Système Artificiel intelligent étape décisive vers IA
  • Il était une foi : l’Intelligence Artificielle [2].
    • Les thaumaturges ont la certitude de trouver l’assemblage d’algorithme et d’objets techniques (processeurs… comparable à la cognition humaine. C’est le modèle anthropique ou anthropologique qui met en scène des robots anthropoïdes à la fois pour préserver l’orgueil de la race qui crée à son image (ritournelle bien connue). L’intelligence humaine sert de matrice à la recherche de solution. La machine a pour fonction d’imiter le cerveau.
    • La voie suprême est, bien sûr, de s’émanciper du modèle cognitif humain. Ici pas d’introspection, mais une pure démarche de résolution mathématique et formelle. L’ersatz de la pensée prend le relais. Solution qui évite de comprendre le fonctionnement de l’Intelligence Hhumaine, bref faire des économies.
    • La voie ananthropique ouvre les portes de l’industrie, du commerce, de la finance, des arts militaires et de multiples développements encore flous : traduction, métavers… Chaque système se spécialise et peut se mixer avec d’autres.
    • Induction  : la cognition humaine n’est pas algorithmique, son schème n’est modélisable.
    • Andler fait une description minutieuse des étapes qui mènent à l’IA que nous connaissons.

L’IA n’est donc pas un cheveu dans la soupe ni une erreur humaine, encore moins une déviance scientifique. Qu’on le veuille ou non, elle est totalement anthropique, même si les objects techniques qui la composent ont tendance à s’autonomiser, du moins à induire des suites logiques ou imprévisibles.

Des milliers de pages déjà imprimées attendent que les plumitifs " experts "
poursuivent les débats. Ici, je tente de consolider des thèmes centraux et, si nécessaire de leur apporter la contradiction ou des éclairages philosophiques trop souvent occultés.

La mathématisation du monde.

A plusieurs reprises, nous avons signalé ce phénomène fondateur de la pensée occidentale. L’onto-théologie n’échappe pas à cette contamination. D’ailleurs, Saint-Anselme affirme que la Raison mène à Dieu. Le vieux Logos a tracé une irréversible appétence pour la chose calculatrice.
Husserl, à la fois mathématicien, philosophe et psychologue, analyse sans appel la Crise (Krisis) des sciences européennes. Sa triple formation donne à ses recherches une profondeur rarement atteinte et qui feront école. Impossible de penser et de développer l’IA sans les différentes formes de la mathématisation et de la logique.

" La mathématique comme royaume d’une connaissance vraiment objective …mettait en mouvement l’homme " moderne " [3] .

  1. L’IA se révèle la digne héritière de cette lame de fond. Elle conjugue tous les apports formels, techniques et mathématiques mis en place au cours des siècles.
    1. Cela pose l’épineuse question d’une opposition au devenir de l’IA comme d’ailleurs à tous les artéfacts qui nous régissent. L’absoluité de la situation impliquerait une résistance tout aussi radicale. Sommes-nous condamnés à devenir des Amish, des refuzniks réfugiés au fond de la Sibérie.
    2. Un désengagement partiel pose la question de la rationalité des choix. Sommes-nous prêts à refuser les acquis de la médecine et autres avancées de la modernité ?
  2. La mathématisation du monde conduit à la profanation du mode, on voit que la question de l’IA est impossible à isoler. Le réductionnisme de beaucoup de commentateurs, malgré de parfaites analyses techniques, sont des " chemins qui mènent nulle part ".
    1. L’IA est bien la " Fille naturelle " de la Métaphysique, elle condense tous les attributs de la vieille Mt que nous avons longuement parcourus.
    2. L’athéisme à son égard reprend l’analyse d’Erns Bloch dans Athéismus im Christianismus. Difficile rejet de notre ADN.
  3. Tant et si bien que, maintenant, le monde nous est donné, livré (par ubérisation) comme totalité rationnelle infinie. Situation inouïe dont peu de monde a conscience.

    " L’humanité en général c’est par essence l’être-homme dans les humanités liées par la génération et la socialité, et si l’homme est un être raisonnable ,il ne l’est que dans la mesure où toute son humanité est une humanité raisonnable …" [4] .

Husserl était encore très optimiste en voyant toujours dans la philosophie : le mouvement historique de manifestation de la " raison " universelle, " "innée " dans l’humanité comme telle. (id. p.21)

Hélas, l’entéléchie, l’acte en son achèvement, n’est pas au rendez-vous. La ruse de la raison a bien des tours dans son sac à tyrannie du logos et la sécularisation perpétuelle de la domination rationalisée ne baisse jamais les bras.

Le connexionnisme stade nouveau de l’impérialisme.

Les spécialistes connaissent la complexité et les prouesses du connexionnisme. Les créateurs de la toile prirent leur temps, mais pour eux jamais de "septième jour". Les enjeux intellectuels et financiers combinent leurs puissances par delà les personnes, c’est la loi du développement universel. [5]Le langage, la logique, le désir mimétique d’initier l’intelligence humaine encore référence des thaumaturges, la robotique, l’intelligence augmentée, toutes applications en " Aidée par Ordinateur" servirent de drop zone (DZ d’entraînement des troupes de chocs). L’entreprise colossale fit et défit des fortunes. Le Nasdaq apparut dès 1971.

Pour nous profanes, admirateurs, utilisateurs zélés ou frileux, le vertige nous saisi et parfois l’effroi. L’intelligence anthropique fut à la fois une assurance de maintien de notre humaine domination et un premier pas vers le transhumanisme. Les cœurs artificiels et autres puces intégrées dans la vieille carcasse amortirent le choc. " La technique peut le faire, elle le fit ".

Dans l’industrie, déjà, les robots, la machine-outil intelligente, ont laissé l’anthropomorphisme au vestiaire. Nous sommes en phase de transition, le capital (trans-étatique et néo-libéral) prépare un nouveau saut. Le choc psycho-social verra les nouveaux thérapeutes, amuseurs et contrôleurs de gestion, gérer le chômage de millions de travailleurs.

La pulsion totalisante de la métaphysique la plus vulgaire a trouvé son nouveau clergé est sa nouvelle Église universelle.

I.A : Frankestein ou Alzheimer ?

La légitimité de l’interrogation s’impose. Nous affrontons une "nouvelle vague" dont le cinéma se déroule sous nos yeux et pour certains en nous.

Alzheimer.

Nous savons déjà que le QI [6]baisse et que les oligarques de la Silicon Valley interdissent à leur futurs génies l’usage des produits qu’ils lancent sur le marché très concurrentiel. L’usage intensif des artéfacts siliconés et siliciumés préoccupent depuis quelques temps le corps médical et psychiatrique. La liste des dommages collatéraux s’allongent. Juste un exemple : dès quatre ans, ma petite-fille avait une tablette sur laquelle elle réalisait des puzzles sous les yeux ravis de ses géniteurs. Le papy barbu et grisonnant (un tantinet malveillant) offrit à la gentille tête blonde un puzzle en bois adapté à son âge. Les parents eurent du mal à admettre que leur chère bambine n’avait pas la notion de l’espace. Le psychologue consulté leur expliqua que le cerveau passait par des étapes cognitives mises en évidence par J. Piaget depuis plusieurs dizaines d’années et que l’écran réduisait l’espace à deux dimensions donc la mise en place de la troisième était occultée. Retour à un planisme bien connu. Le père informaticien comprit que les réflexes pavloviens ne signalaient pas une intelligence adaptative. La tablette chut dans la poubelle de l’histoire.

Un esprit complotisme (terme, peut-être, fort approprié) dirait que les promoteurs de la machination ont un plan à long terme. Ramollir les méninges et recréer une nouvelle ère triomphale de la marchandise. Fabriquer des consommateurs béats, " donner du temps au cerveau pour la publicité", un objectif qui peine à se dissimuler.

L’automatisation et les robots servaient à remplacer la force musculaire et la fatigue. L’IA change le paradigme, la récursivité [7]amorce une révolution : le quantitatif devient aussi qualitatif.

Les promoteurs doivent, en plus des améliorations perpétuelles de leur algorithmique veiller à ce que le " vulgaire " accepte et digère la dépossession progressive de son pouvoir. Rien moins que la construction de l’intelligence collective décorporalisée.

Frankenstein.

L’IA renvoie à des lourdeurs mythiques et à des peurs ancestrales. Preuve, s’il en est, qu’elle rejoint les profondeurs de la métaphysique.
Quelques remarques :

    1. D’abord, la parodie du Créateur saute aux yeux. La créature devient elle-même Créateur. Dieu créa l’homme à son image, le créateur de Frankenstein invente le clone par bricolage et collage de pièces détachées.
    2. Donc, l’arrière-fond religieux explicite ne fait aucun doute. La techno-science est bien l’héritière de la tradition occidentale.
    3. Le statut de la nouvelle créature ne manque pas d’inquiéter. La découverte de sa sexualité donc de son autonomie fragilise le créateur-bricoleur dans son laboratoire.
    4. Sa violence meurtrière ne fait qu’imiter celle de l’environnement dont il vient. Son état de nature serait plutôt du genre " bon sauvage ou bon monstre ". La perversion lui est imposée. Le social est violent, non le naturel.
    5. Autre fait important, l’homme est né de la terre, Frankenstein du savoir. Le statut littéraire fantastique de l’époque de narration/gestation du héros mute, la fiction devenue potentialité voire réalité s’effectualise en permanence.
    6. L’inconscient du texte introduit une dimension d’exclusion : il est littéralement " hors-sol " et a donc un relent de satanisme. Cela reflète l’ambiguïté de pensée du XIXème siècle. Pourtant, la pulsion sexuel est bien présente.

L’IA, le retour. La parenthèse valait de détour, car elle permet de mieux comprendre les enjeux contemporains de L’IA.

    1. La créature, fruit de l’intelligence humaine, progresse en se perfectionnant. Le darwinisme technologique fonctionne parfaitement, ne survivent que les spécimens qui dominent techniquement, économiquement et trouvent un marché captif au niveau des consommateurs mondiaux, Ex : I - Phone, la tablette, le GPS…

Critique de la raison pure numérique.

L’IA, le retour. La parenthèse valait de détour, car elle permet de mieux comprendre les enjeux contemporains de L’A.

La créature, fruit de l’intelligence humaine, progresse en se perfectionnant. Le darwinisme technologique fonctionne parfaitement, ne survivent que les spécimens qui dominent techniquement, économiquement et trouvent un marché captif au niveau des consommateurs mondiaux, ex. : I - Phone, la tablette, le GPS…

IA : Conflit dans l’intelligence.

Catherine Malabou attira notre attention sur les métamorphoses de l’intelligence : du QI à l’IA (Cf. la note 6). Nous savons aussi que toute révolution technique entraîne l’émergence de nouvelles civilisations (la roue, l’astrolabe, l’électricité, la vapeur…) ou par le moins des changements d’époque , des accélérations. L’IA possède toutes les caractéristiques d’un bouleversement inouï, par contre son introduction progressive ne provoque pas de mouvements de refus. Les consommateurs biberonnent la jouvence de l’abbé IA avec délectation devenant des professionnels de la "souris".

Nous entrons à marche forcée dans un Révolution généralisée : technique, économique, social, politique, esthétique. La première question que se pose une minorité de scientifiques et d’"honnêtes hommes" : Quid de l’intelligence si la machine s’engouffre dans nos synapses, notre réflexologie, notre manière de créer l’ouvre-d’art, de composer de la musique, d’écrire des roman marKeté (formaté, thématisé et rédigé), de prendre en charge de plus en plus de fonction organiques ou intellectuelles.

  1. La dataïsation du monde et l’assignation à l’organe externalisé qu’est l’I-phone (et dérivés) implique le " glissement progressif " vers la docilité face à l’im-monde devenu normativité.
    On rêvait des cyborgs comme avenir, nous devenons des cybcogs , êtres cognitivement diminués.

    En fait, l’homme-augmenté cache l’homme diminué de la comprenette.

  2. Nous assistons à un renversement complet des certitudes issues des Lumières. Bien évidemment, tant du point de vue individuel que collectif : le politique inclus.
  3. Dans le contexte mondialisé, l’IA se géopolotise et la question militaire remonte à la surface, l’Ukraine et le conflit israélo-palestinien reflètent cette redistribution des enjeux.
  4. L’expert, le conglomérat des algorithmeurs, n’est pas forcément conscient de ses responsabilités, mais il fonctionne sans référence au politique, à l’éthique. Devenu Démiurge, il crée. La beauté interne suffit à sa
    satisfaction. Il oublie que des Stratèges pilotent son clavier.
    Par ailleurs, nous sommes dans une situation de régénération du capital (investissements énormes pour le maintien des profits et la volonté de prendre l’avantage sur l’autre Stratège.)
  5. Kant en fait des cauchemars, son cher " Homme n’est plus le véhicule des règles données par la nature ". L’IA nous propulse hors de notre "nature" fantasmée. Le logos pur fait homme (incarnation) déshumanise à son tour son créateur trop-humain. L’autonomie de la créature - l’algorithme mimant l’intelligence naturelle - prend sa liberté, comme Adam et Eve. Question fondamental : le retour à Eden est-il encore possible !
  6. L’IA renverse radicalement le rapport entre le signifiant et le signifié du contenu. En clair, la circulation du data prime (son indexation, son stockage) sur le contenu. Le donné est toujours-là dans les plis du cloud. Étant disponible, il n’est plus nécessaire de le mémoriser après l’avoir compris. De toute façon ChatGPT.X est là pour le restituer dans toutes les langues et tous les styles.
  7. L’appareillage technique devient le point nodal, le média se substitue au médié.
  8. Günther Andler a raison l’homme est entré en obsolescence qu’il a lui-même programmé. L’arroseur arrosé des Frères Lumières met parfaitement en scène le tragicomique de la situation.
  9. L’IA, pour l’instant, induit un conformisme généralisé. Copier n’est pas savoir dit le fayot de la classe au cancre hilare. Le jour où l’IA deviendra créative, capable de formuler des théories nouvelles, l’époque de la guerre des boutons s’achèvera. Pour l’instant, la vélocité nous captive, mais la voracité anthropophage hante l’Algorithme.

La critique de la raison numérique dépasse largement le cadre de cet article. Toutefois, elle est déjà l’enjeu fondamental d’un suivi clinique indispensable.

IA : la nouvelle métaphysique généralisée

Pendant des siècles (en occident élargi), la métaphysique (Mt), version pour intello, de la religion dominante a régné malgré et surtout grâce à ses divisions et ses chamailleries.

Nous avons vu dans les deux précédents articles les arcanes et les fourberies de la Mt.

    1. Les producteurs-créateurs de l’IA, depuis l’origine, ont l’intention affirmée de promouvoir un " nouvel esprit scientifique " capable de servir d’ossature, de cerveau et de croyance à la modernité mondéanisée. Avec l’IA, les querelles doctrinaires et politiques passent en second plan. Les turpitudes contemporaines servent à tester, développer, améliorer, promouvoir la nouvelle sécularisation d’une puissance inimaginable.
    2. Les inventeurs de la machine à vapeur avaient-ils conscience de la révolution qu’ils lançaient. Idem pour Lavoisier. Une machination prenait son élan, on connaît la suite : la Révolution industrielle.
    3. " L’IA est un danger pour l’humanité plus grand que le réchauffement climatique "

    4. Nous vivons dans la matrice, que les incrédules regardent Matrix ou relisent 1984.
    5. Malraux avait vu qu’une civilisation s’agrégeait autour d’une religion. L’IA en est l’incarnation, la mise en œuvre concrète. De l’immanence des données (dans nos objets dataïques) émerge une nouvelles transcendance.

    6. En fin ce compte, la machine doute de nos capacités, elle génèrera sa propre Machination (Vioulac), chemin de croix de l’humain, mais sans résurrection. L’eschatologie et la parousie sont dans la machine.
    7. "L’IA s’annonce comme la force explicative de notre temps ", comme le fut le couple christianisme / métaphysique pendant des siècles. [8]
    8. Comme son illustre prédécesseur l’IA engendre un nouvel ordre politique et une nouvelle Grande transformation (Karl Polanyi 1944, traduit en français en 1983), celle du capitalisme de surveillance, de la marchandisation sans limite. En 1958, Arendt prévoyait "l’avènement de l’automatisation des usines ". Que dirait-elle aujourd’hui ?
    9. La transformation atteint des profondeurs à frémir : elle génère une nouvelle force de subjectivation dont nous apercevons qu’à peine les véritables conséquences. Nous devenons des cybcogs, des machines amoindries, des terminaux passifs.
    10. La société de consommation, depuis longtemps labellisée (Anders, Baudrillard…) était la plateforme de lancement, du dispositif machinique. Nous avons tous succombé à ses charmes (enfin presque), la super-glu nous visse à nos vices.
    11. La technique s’affranchit de ses attaches et cadres sociaux d’antant.
    12. Jacques Ellul, les nouveaux possédés, 1973

    13. La SF est morte de ses prédictions réalisées. Nous vivons le futur à chaque instant. Autrement-dit le futur est déjà là. (Cf le chapitre suivant).

Ces articles ne font qu’ouvrir les discussions. Seule certitude, les surprises afflueront. Le Saint-Empire Numérique (SEN) se déploie sous nos yeux ébahis ou effrayés. Le question de l’athéisme reprend sa justification. Comment lutter contre cette nouvelle religion née de nos entrailles ?
Brièvement, quelques ZEP, Zones d’Envahissements Programmés :

— Le langage : traduction, écriture, apprentissage…
— Les relations humaines : l’algorithme fatal est arrivé.
— Oblomov, l’homme apathique, cède le pas devant Stakhanov, le branché à la production, l’homme devenu pièce détachée, donc interchangeable de la Grande Machination, mais aussi boulimique de la consommation.
— Les grandes oreilles du smarphone géolocalise, profile, conditionne (alerte).
— L’usine à crétins marche 7/7J et 24/24H. Les zombis errent leur guide sidéral à la main.
— La libération du travail progresse à la grande joie des petites-mains.
— Le libéralisme programmé aboutira les rites politiques. L’urne sera funéraire et électorale.
— L’algorithme juridique résoudra les conflits (les tests sont en cours).

Et j’en passe. Sartre avait raison, " il ne faut pas désespérer Billancourt "

ESPACE / TEMPS : la Grande vadrouille en Absurdie.

Le dataïsme et l’IA transforment en profondeur notre rapport au monde. Bien qu’à l’insu de notre plein gré, comme dit le célèbre champion des pédales. Bref on y est, sans s’en rendre compte, comme Dieu, l’IA étant inodore, notre odorat faillit en toute quiétude.
Nos schémas classiques du rapport Espace / Temps subissent de profonds bouleversements. La voiture, le train à vapeur, le TGV, l’avion nous ont acclimaté à la compression de l’espace/temps. La vitesse concentre les recherches des technologies, le markéting en fit un champ de bataille promotionnel.

Espace

Déjà, l’électricité met en route une première mutation dans la perception de l’espace, le télégramme, le langage morse, annulent la notion de distance. Le signal analogique franchit le mur du son et la vitesse de la lumière devient le nouvel enjeu de la théorie scientifique.

La maîtrise de l’espace engendre les premières figures géométriques et calculatrices. La physique s’autonomise de la philosophie. La pensée grecque nous livre les prémisses d’une théorie de la spatialité. Sans espace, le lieu distinct n’existe pas. (A comparer avec le silence en musique ou le vide entre les molécules). Donc, l’espace est "plein" de concepts secondaires. Il est premier.

Évidemment, les métaphysiciens s’empressèrent de voir dans l’espace une "extension de Dieu" : l’espace et l’infini, le couple rhétorique par excellence. L’omniprésence divine trouve ici son alibi.

Des siècles de disputations suivent. Nietzsche tente de remettre le compteur à zéro : l’espace ne constitue qu’une abstraction…en soi, il n’est rien d’autre qu’une forme subjective, née de la supposition d’un espace vide. Il énonce une formule-choc :" espace et force ne font qu’un ". L’interprétation rend la position délicate, en effet, est-ce une philosophie politique de conquête et de domination de l’espace ?

La conquête de l’espace : l’extension de la volonté de puissance.

L’espace et le temps n’existent qu’en relation avec la matière et sont par conséquent résultats de l’acte divin de Création. (Al-Ghazali XIème siècle)

Temps

La durée subjective comme origine du temps signifie donc que le temps pur n’existe pas.

Le temps comme poubelle universelle inclut l’antériorité, le présent et le futur. Selon les courants de pensée, il est un flux, un devenir. Il inclut à la fois la causalité et la transcendance.

Là aussi, les métaphysiciens et les physiciens explosèrent le compteur à spéculations : directions du temps, continuité du temps, mensurabilité du temps. D’ailleurs, le Temps fricote avec l’Être, thème obsessionnel de Heidegger.

La modernité constate que l’espace et le temps ne sont pas sécables. Le multivers (ou plurivers) pointe son nez. Les vieux formalismes mathématiques et épistémologiques volent en éclats. Et pas qu’eux, d’ailleurs…

Elle permet de réconcilier les termes de la dualité espace/temps. La concrétisation la plus populaire, le smartphone, a conquis les milliards démographiques. Les peuples "premiers", les refuzniks (les derniers des Mohicans) et les heureux habitants de zone blanche constituent la marge de progression de l’emprise de l’empire du progrès. Le capitalisme de surveillance a trouvé son arme absolue.

La " siliconisation du monde ", synonyme de dataïsation, fait monde. Derrière, l’écran, l’artéfact universel, une Machination sublime tourne à plein régime. L’écran devenu la " médiation " symbolise le nouvel esclave, consenti, maintenant. La servitude volontaire devient béatitude machinique.

Le capitalisme de surveillance peut passer à la vitesse supérieure : le capitalisme sans travailleur (ou presque) ce dont il rêve depuis longtemps.
L’IA pourra diriger une usine de robots (adaptés ou polyvalents) sans coût du travail des petites-mains ni charges salariales. L’Utopie, la vraie, quoi ! Pas beau le futur !.

Ce que la métaphysique peina à imposer, l’IA le réalise en quelques décennies dont nous ne contemplons que les prémices. La Machination avait mis le pied sur la pédale, elle est prête à lâcher l’artillerie lourde et les forces spéciales.

LA COMMUNICATION : la nouvelle cléricature

Le terme en devenant polysémique brouille les pistes. Revenons au principal.

Religion et métaphysique expriment à la fois le besoin de relier et de disserter sur la nature du lien. Les deux compères servent, sans vergogne, à imposer leur réalité à l’ensemble du groupe dont ils représentent la quintessence.

Les sécularisations successives ont hissé la technique au sommet olympien de la canonisation. Par conséquence, la communication a passé une sorte de pacte d’allégeance avec la technologie. Sans l’édition (papier ou numérique), la TSF, la TV, le Smartphone et autres dataïsmes, elle sombrerai dans l’insignifiance. Pour le coup, le SEN serait un roi nu.

Le monde machinique lui sert de référent : d’Aristote qui théorisa la rhétorique aux dernières techniques de traduction, d’écriture, de rétro-action sur le signifiant (sondages…).

Technique et communication sont les deux Universaux de notre mode d’être-au-monde.

Plus d’île sauvage, plus d’espace de liberté tant prisés de notre militance. D’ailleurs, les zadistes l’ont parfaitement compris. Le buzz fait partie de l’armement de tous les mouvements cherchant à exister. Nous baignons dans la soupe des techniques de manipulation (publicité, propagande), de circularité et interactivité.

Tautisme.

Lucien Sfez [9] a forgé le concept de Tautisme à partie de tautologie (Je me répète donc je trouve) et d’autisme (système de communication qui rend sourd-muet, isolé des autres, quasi autiste).

La réalité est représentée comme réalité vraie. Cette réalité écranique joue sur tous les fronts à la fois, une véritable guerre totale pour la domination, rien ne lui échappe, de plus, nous l’avons dit, par rétro-action, elle modifie les paradigmes de sa domination selon les nécessité de la machination. Le tautisme entraîne une auto-organisation spontanée, privilège de l’IA. L’image et sa représentation par l’image-copie (imitation) devenue l’alpha et l’oméga découple les sensations (œil, l’ouïe) et met en place nouveau paradigme : le bruit. La saturation occupe l’esprit. La communication devient une technologie de l’esprit. Ce que la religion et la métaphysique pratiquaient à merveille.

Critique de la communication.

Lucien Sfez entreprend un vaste travail qui passe par trois étapes :

  1. La fin de la communication traditionnelle, domaine réservé du théologien-politique au dispositif bipolaire : l’enfer et le paradis.
    La communication (et ses dispositifs) n’apparaît pas dans la cité grecque. Ensuite, les théologies fondatrices et symboliques : Dieu, l’Histoire, l’Égalité, la Nation, la Liberté, la Révolution s’érodent, car elles s’usent que si l’on s’en sert - elles remplirent leur rôle à merveille.
  2. La technique corroda les belles envolées lyriques d’antan. Ce qui fait que la critique de la communication impose une critique de la techno-communication. Maintenant, la technique, règne de la Machination, a pris les choses en mains. Elle joue le rôle de lien universel. L’homme paresseux a abdiqué, séduit par les merveilles externalisées mise à sa disposition. La finalité passe du récepteur (l’écoutant) à l’émetteur (l’IA).
  3. Les métaphores (le sang, le corps, l’âme…) change de registre. Maintenant, la médiation technologique impose ses normes : la machine devient le référent unique, purement mécanique et numérisé. La mémoire externalisée se transforme en dataïsme. L’amnésie, l’acalculie, la perte progressive de l’écriture sont au rendez-vous du nouvel âge du crétinisme illustré pour les Nuls.

L’avenir d’une illusion.

  1. Le numérique (au sens générique) prend la dimension d’un nouveau soi (avant que le moi ne soit à son tour attaqué). MyOrdi
    (maintenant MySmartphone) construit mon identité personnelle et collective, mes followers prouvent mon existence. on assiste donc à une véritable way of life .
    Maintenant la SF se vit au quotidien. Mon futur est mon présent, à la fois infantilisme et refus de vieillir et adoration d’un Dieu enfin proche de moi et qui veille sur moi ; les applis me rassurent.

    " La machine à communiquer est seule à engendrer un retour à la métaphysique, hier encore considérée comme une vieille branche de la philosophie détrônée par le marxisme, le structuralisme, le freudisme "

     [10]
    Ceux qui pense que R-D M radote et débite sa maronne sécularisante comme un TOC peuvent réviser leur talent de clinicien. Relire Feuerbach s’avère une thérapeutique efficace, malgré ses insuffisances.

  2. Frankenstein : le retour. Lucien Sfez utilise aussi la métaphore de l’homme fabriqué. La computation prend le relais de la cognition. C’est la constitution d’une nouvelle trilogie cognitive (ou trinité, ou pensée trine) :
« Autisme, tautologie, totalitarisme. »
La frankesteinisation.

Elle implique une nouvelle morale universelle, une Pax numérica dont le centre réside dans la Silicone Valley. La moraline est donc une onction venue de l’Ouest, le messianisme américain remplace le messianisme juif, si complexe, en le réduisant à sa fonction principale de domination mondialisée.

Par ailleurs, apparaît une culture du self, le selfie le prouve. Sommet d’un narcissisme instrumentalisé qui se prétend connecté en permanence au monde, mais, en réalité, simple atome relié à la masse par une médiation technique écranique. Cette fragmentation/atomisation fait communion. Les selfeurs baignent dans ce que j’appelle A<=>C , l’atomisation individualisante génère la foule, la psychologie de masse, l’identité virtuel par l’artéfact massifiant.

La grande nivellation passe par la vitesse (cf.infra), agent de contamination. On le sait le contenu perd son importance. La performance machinique implique un culte de la performance, fussent-elle insignifiante.

Vérité et réalité se confondent :

" La seule vérité de la réalité, la seule réalité de la vérité sont leur utilité. "
 [11]

La mémoire externalisée dispense de la mémorisation/ compréhension. La coupure de réseau signifie amnésie : de quoi faire réfléchir les hackers.

Le nouveau dieu est le self, sorte de Veau d’or dont on connaît la tragique et sanglante issue sacrificielle.

Théologie séculière.

Les promoteurs de l’IA se condamnent à produire une scolastique en béton dont le but sont la production, la promotion et la diffusion d’une pensée théologico-machinique acceptable par l’humain en cours de dégénérescence cognitive. (Les dataïstes se considère comme une élite, une caste.)

    1. La bannière de la laïcité permet de désodoriser la théologie en cours de déploiement. Le régime de la séparation conçu comme fondement de la politique (séparation des pouvoirs disent-ils) offre à la nouvelle théologie une virginité rassurante, car la machine n’est pas sujette aux luttes intestines.
      Ce paradigme lui confère une infaillibilité quasi papale, chère à l’Absolu hégélien.
      Contrairement à Dieu, la visibilité de la machine lève toute ambiguïté.
    2. L’IA avec la pax numérica établit une nouvelle religion laïcarde, le plus merveilleux régime politique qu’il soit, car scientifique. Le Res numérica apporte un supplément d’âme au connecté. La cause et l’effet se fondent en faveur d’un monisme rassurant.
    3. Le tautisme se révèle une théologie totalitaire, car elle porte au monde un savoir certifié, l’égalité devant la machine, le bonheur de partager sa solitude de monade. Il court-circuite les anciennes certitudes.
    4. Les publicitaires revêtent la défroque newlook. Hegel disait quel la lecture du journal était le bréviaire du citoyen, aujourd’hui l’écran démultiplie les potentialités de la rotative.
    5. Comme toute théologie, la séculière vise à l’universalité. Les confrontations (débats, disputions) confortent la moraline comme baume antalgique.
    6. Tautisme => Totalitarisme ,tout simplement parce qu’il prétend, avec l’IA, apporter au monde la totalité des savoirs et le recyclage des anciens paradigme : égalité, bonheur, travail-loisir, par le biais de la machinerie.
    7. La vérité médiatique prend le relais. Le " Vu-à-la TV " s’accompagnement maintenant d’une écrantisation conquérante.
Malaise chez les Refuzniks.
    1. Dans le village mondialisé, la tisane infâme a remplacé la potion magique. Tout nous renvoie au simulacre généralisé. La fée du logis, la sorcière des plasmas, modèle nos schèmes. L’écran iconique rend la vie difficile aux iconoclastes. L’iconodulie s’affiche partout, peu d’espace lui échappe. Big Brother règne sans vergogne et ,comble de déraison, nous payons par prélèvement automatique notre asservissement.
    2. Les implications ne sont plus virtuelles, la sidération change les perceptions. Certes, des relents de nationalismes et communautatismes persistent, preuve de la capacité de la machination à laisser perdurer les strates d’aliénation. L’adaptivité de la domestication prolonge celle du monothéisme à absorber les survivances du paganisme.
    3. " Refuser la communication, c’est sans doute rester indemne, mais dans l’impuissance."
      14, page 439
    4. Sfez illustre son propos, à juste titre, par la métaphore du Veau d’or.
      Pendant que Moïse reçoit l’unique parole du Créateur ce qui fixe l’écriture comme réceptacle de la Loi, en bas dans la plaine, le bon peuple perpétue le besoin de représentation par l’image. On connaît la suite tragique de la scène.
      Ici, deux tendances lourdes réémergent dans l’étude de la communication.
      1. D’abord, l’Ecrit comme parler silencieux. Le silence rend la musique possible et le vide permet aux particules de flotter dans un espace restreint.
      2. L’iconodulie montre la faiblesse d’esprit, l’image pervertit le signifié.
      3. La scène primaire de la transcendance se joue dans le Sinaï. Le matérialisme du Veau d’or singe une spiritualité horizontale, que certain nomme immanence, comme si le matériau était une réalité divine. Le Tautisme est une idolâtrie.
      4. Dès l’apparition du " minitel ", le dialogue communicationnel annonce l’extension incroyable d’une dialogique médiée. Aujourd’hui, les visio-conférences accélèrent la compression de l’espace et du temps. Les extensions dialogiques ne cessent de conquérir de nouveaux domaines. Il ne s’agit plus de voir, mais d’être vu.
      5. Le tautisme devenu communauté acquiert une dimension sacrée. La messe est permanente. Le réseau rassemble toutes les sectes ( cuisine, histoire, amicales des anciens élèves…)

Nous vivons dans un procès, un continuum ininterrompu de flux. Sortir de l’onde porteuse condamne à la folie ou à jeter un doute sur l’intention du réfractaire. C’est se situer hors la Loi du tautisme qui devient un contrat social. Le tautisme impose un holisme diffus. Le consommateur valide les présupposés.

CONCLUSION : Jamais sans ma Méta !

Notre parcours de l’IA comme sécularisation en cours de déploiement ne peut faire l’économie d’une approche du politique. dont la nature fondamentalement conservatrice, celle des intérêts d’une caste

Liturgie politique : les nouveaux rites de la Domination
    1. La/le politique ne pourra jamais renier son caractère profondément conservateur. L’intérêt de la caste (classe ?) dirige son activité. La lutte pour le pouvoir n’est que la démagogie au nom d’une démocratie fictive souvent réduite à un formalisme.
    2. Ce conservatisme explique le retard permanent de la politique sur la technique. Elle court sans cesse après le train de l’histoire. Déjà les techniques de markéting et de communication ont pénétré le "milieu" ou "sphère politicarde".
    3. L’introduction de l’IA dans les processus politiques révolutionneront bientôt les fondements des rites liturgiques de la politique. Le vote et les votations (consultation populaire) par Smartphone murissent dans les alcôves de la Machination.
    4. La pratique de la politique coûte cher, l’IA permettra très vite de réduire la politique au rend d’une marchandise symbolique au rabais. On le sait l’IA re fond les représentations. Les prémonitions de " 1984 " se réalisent en douceur.
    5. La vie sous le règne triomphant de l’IA permettra de concilier les contradictions au modèle hégélien de l’Absolu. L’écran devient déjà le bréviaire du citoyen.

Sommes-nous prêts à refuser les dictats ?

Refuserons-nous les bienfaits d’un holisme humaniste ?

Quelle organisation les refuzniks auront-ils les moyens de mettre en place ?

L’économie, tête de pont du capitalisme revisité
    1. Les chevaliers de l’avant-garde de la nouvelle métaphysique chevauchent en compagnie de l’IA. L’innovation fait partie du développement obligatoire du capital (Marx).
    2. Les objectifs se précisent, l’augmentation et la pérennisation des profits passent par la diminution drastique des charges. Le salariat représente le prochain obstacle à sauter.
    3. La mécanisation, le taylorisme, l’automation ont largement introduit les nouveaux paramètres. L’amélioration des conditions de travail pour certains maintient, en périphérie, l’exploitation traditionnelle.
    4. L’IA amorce une nouvelle révolution dont les contours ne cessent de grandir. L’IA nous fait entrer dans le SEN (Saint-Empire Numérique).

Dernières nouvelles du front :

Elon Musk annonce la couleur, l’IA part à l’assaut de l’emploi. Le travail, donc le salariat de masse, dernière servitude du capitalisme traditionnel, est la cible principale. La variable d’ajustement doit diminuer. Les spécialistes prévoient trois cent millions d’emploi en moins.

Même la création risque de pâtir du raz-de-marée. D’ailleurs, l’IA investit déjà ce domaine. Le conformisme esthétique existe déjà.

L’IA réalise l’Absolu logique d’une métaphysique que l’on croyait déconstruite et moribonde.

Que faire ?

Se marginaliser à l’ombre des bienfaits de l’humanité dataïsée ?

Devenir des amish, mais sans le substrat religieux ? On connaît le sort tragique des utopies.

La révolte devenant de plus en plus difficile sous la férule du capitalisme de surveillance, les issues se raréfient.

Le capital aura toujours besoin de consommateurs pour faire tourner ses usines robotisées. Le revenu universel et les jeux du cirque maintiendront la paix sociale.

Refuser d’être tracé, c’est être suspect. Traçage et traçabilité, les deux mamelles de l’IA.

La société à deux vitesse s’installe confortablement. Les agents mercenaires de l’IA le savent, d’ailleurs, ils éduquent en conséquences leur progéniture.

Ces articles tentent d’introduire une réflexion sur le néo-totalitarisme.

Il faut bien conclure provisoirement.

« Aucun être humain n’est fait pour pouvoir supporter très longtemps d’être devenu “superflu”. »

L’Émigré, Günther Anders.

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BIBLIOGRAPHIE :

  1. Jean Vioulac Approche de la criticité, Philosophie, capitalisme, technologie ; Puf, 2018, 499 pages.
  2. Jean Vioulac Apocalypse de la vérité, Ad Solem, 2014, 262 pages.
  3. Mark Alizard Informatique céleste, Puf, 2018, 203 pages.
  4. Paul Mathias Qu’est-ce que l’internet ? Vrin, 2009, 128 pages
  5. Franck Varenne Qu’est-ce que l’informatique ? Vrin, 128 pages
  6. Daniel Parrochia (dir) Penser les réseaux, Champ Vallon, 2001, 269 pages.
  7. Éric Sadin IA ou l’enjeu du siècle : anatomie d’un antihumanisme radical. L’Échappée, 2018, 301 pages.
  8. Éric Sadin La vie algorithmique Critique de la raison numérique, L’Échappée, 2015, 281 pages.
  9. Daniel Andler IA Intelligence humaine : la double énigme, Gallimard, 2023, 432 pages.
  10. Éric Sadin La Siliconisation du monde. L’Échappée, 2017, pages.
  11. Sébastien Broca Utopie du logiciel Libre, Le passager clandestin, 2ème éd 2018, 378 pages.
  12. Alban Leveau-Vallier IA l’intuition et la création à l’épreuve des algorithmes, Cham Vallon, 2023, 414 pages.
  13. Marius Bertolucci L’homme diminue par l’IA, Hermann, 2023, 230 pages.
  14. Lucien Sfez, Critique de la communication, Seuil, 2ème édition, 1992, 527 pages.

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