Divergences Revue libertaire en ligne
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David Venegas Reyes « Alebrije »
1 - Prison de Santa María Ixcotel, le 17 avril 2007
Article mis en ligne le 14 mai 2007
dernière modification le 5 mai 2007

Je suis actuellement détenu dans la prison de Santa Maria Ixcotel, dans ma chère ville d’Oaxaca, on m’a mis derrière des barreaux suite à une accusation fabriquée de toutes pièces pour possession de drogues, les policiers qui m’ont arrêté m’ont frappé et voulaient m’obliger à être photographié en tenant de la drogue, ce à quoi je me suis refusé, après deux longues journées dans les cachots de la PGR-UMAN (Unité mixte de suivi du petit trafic de stupéfiants). C’est une fois transféré ici que j’ai appris que j’étais en outre accusé d’autres crimes, un délit de
sédition et plusieurs attentats contre la société de l’Oaxaca, notamment l’incendie du tribunal de cet État, le 25 novembre. Est-il utile de le dire au vaillant et digne peuple de l’Oaxaca, toutes ces accusations son fausses. Nous savons tous comment agit le gouvernement pour se venger de ceux qui luttent pour une société juste, digne et fraternelle.

Durant tout le temps que j’ai passé ici, mes compagnons d’infortune n’ont pas pu voir chez moi la moindre trace de souffrance, grâce à vous tous, au dehors, qui m’avez soutenu. J’ai su les actions que vous avez effectuées pour exiger ma libération et celle des autres compañeras et compañeros prisonniers politiques du mouvement de l’APPO et des autres luttes, ce dont je vous remercie du fond du cœur. C’est dans un tel moment que je réalise la nouvelle phase dans laquelle se trouve la commune d’Oaxaca. La fraternité et la solidarité gravissent et débordent les murs des prisons, je vous sens ici, tout près, tous, ma famille, mes amis et ce grand peuple, grand par son cœur, par ses espoirs et par son intelligence. Tous vous l’êtes, je ne trouve pas assez de mots pour vous dire ce que votre
soutien et vos protestations ont signifié pour moi dans ces moments difficiles, mais si je le pouvais je vous serrerais tous dans mes bras et peut-être qu’ainsi la proximité de nos cœurs vous transmettrait-elle, mieux que la parole, mes remerciements et mon amour. J’éprouve un grand bonheur de savoir que des mobilisations vont avoir lieu et continueront, il faut continuer la lutte, sans haïr ceux qui nous voudraient soumis, car nous qui possédons la raison nous n’avons nul besoin des ravages que laisse la haine dans le cœur pour trouver les motifs de continuer à nous battre. Dans chaque visage ancien, dans chaque mot d’ordre, dans chaque inscription qui surgit furtivement dans la nuit, dans chaque enfant, dans chaque danse et dans chacun d’entre nous qui sommes prisonniers il y a les motifs fraternels suffisants pour poursuivre la lutte. Je vous convie à ne jamais abandonner ce combat, jamais.

De même que personne mieux qu’une mère ne sait ce qui est le mieux pour son enfant, tout individu et toute collectivité, tout peuple, toute ville, tout quartier, etc., sait ce dont il a besoin pour vivre mieux. Notre
destin est entre nos mains, mon emprisonnement montre crûment comment le gouvernement s’arrange ces temps-ci pour poursuivre la répression systématique du mouvement de l’Oaxaca. Mais contre la répression, la mobilisation ! Que jamais nos jambes fatiguées et nos gorges douloureuses ne nous empêchent de continuer à exiger justice et liberté pour tous et pour toutes, au dehors et ici à l’intérieur. Je dois dire que la possibilité de pouvoir communiquer avec vous, Oaxaquiens et Oaxaquiennes dignes et rebelles, m’empreint d’une grande émotion, seul mon corps est enfermé derrière les murs de cette prison. Mon esprit, lui, est auprès de vous, renforçant encore le moral de la rébellion, de l’émancipation et de l’autonomie. Là au-dehors, sachez que la musique des mots d’ordre que j’ai eu l’occasion d’entendre crier depuis que je suis enfermé ici est restée
ancrée au plus profond de mon cœur.

Que vole vers vous, non tel un chat qui grimpe furtivement les murs, mais comme un géant qui les démolit et les traverse, ma ferme conviction dans la lutte pour ce que je sais être juste et qui triomphera finalement.

David Venegas Reyes "Alebrije"