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Collectif,
Liban : Lettre ouverte aux dirigeants libanais réunis à ,Paris sous la houlette de Bernard Kouchner
Article mis en ligne le 17 septembre 2007
dernière modification le 8 septembre 2007

En relation avec Sarha M. qui a attiré notre attention sur la "lettre
ouverte..." qui suit, et sur l’intérêt - parfois inégal - qu’elle
peut susciter dans la crise actuelle du Liban, nous décidons de la
publier telle que, sans aucune altération ou commentaire...
En revanche nous la mettons en discussion sur le groupe auquel vous
pourrez vous joindre en cliquant sur le lien réservé à cet effet.
A plus d’un titre, et ne serait-ce que pour rappel historique de la
domination du Liban par les politiques Franco-américaines depuis des
décennies, ce document trouve sa place dans le débat en cours contre
l’ assujetissement méthodique du Proche et du Moyen-Orient...

Bonne lecture !

"Les amis du négatif."

La liste des signataires est à la fin de l’article

Vous voilà enfin réunis en France sans que l’on sache si l’on doit
s’en réjouir ou le déplorer.

La démonstration est faite qu’il vous faut une terre étrangère pour
vous parler, comme si le salut ne peut venir que de l’extérieur. Comme
si vous ignorez que l’extérieur fait partie de vos problèmes et non de
la solution de vos problèmes.

L’Histoire en est témoin : Le premier dialogue a été noué à Lausanne
(Suisse), en 1984, le deuxième à Taëf (Arabie saoudite), en 1989, et
le troisième maintenant à Paris. Des dates qui retentissent pour bon
nombre d’entre vous comme des reniements.

Paris, précisément, comme si vous vouliez apporter la preuve que vous
êtes demeurés, soixante ans après l’indépendance, d’éternels mineurs,
vous, grands seigneurs du Liban chatouilleux sur vos prérogatives et
vos passe-droits, d’éternels mineurs, objet d’une tutelle permanente.
Un comble. Sinon comment expliqueriez vous cette rencontre sous les
auspices de votre ancien tuteur, sans doute à l’origine de nombre de
vos maux, en taillant ce petit pays à sa mesure ?

Vous l’avez constaté sans doute à vos dépens, même si vous en êtes, -pour combien de temps encore ? - les principaux bénéficiaires. Unique
pays au monde se revendiquant de la laïcité, la France a été le
premier pays, historiquement, à institutionnaliser et à
instrumentaliser le communautarisme dans son protectorat libanais
.......en visionnaire,........en lointain précurseur de la
communautarisation générale de la vie publique du Moyen-Orient.

Certains d’entre vous portent les espoirs de l’Occident. Vous en êtes
la lumière, alors que vos adversaires sont jetés dans l’opprobre,
rejetés dans l’ombre quand bien même ils auront lavé l’honneur
militaire arabe, et écrit, en lettres de sang, certains des faits
d’armes les plus glorieux de l’histoire arabe récente. Passons. Au
Liban, nous ne sommes pas à une contradiction près.

Ainsi donc vous passez pour les fiers défenseurs de la démocratie, de
l’indépendance et de la souveraineté du Liban, redevenu sous votre
égide un havre de la chrétienté d’Orient, face à la barbarie
terroriste et islamiste.

Soit. Mais alors comment expliquer que deux d’entre vous, désormais à
la pointe du combat anti-syrien -MM. Saad Hariri et Walid Joumblatt-
aient été les principaux bénéficiaires de l’affairisme libanais sous
tutelle syrienne.

Comment expliquer que M.Amine Gemayel, en pointe du combat pour
l’indépendance du Liban, soit passé par les fourches caudines de
l’armée israélienne pour accéder à la magistrature suprême, en
récidiviste familial, suivant en cela l’exemple de son cadet, Bachir.

Comment expliquer que M. Samir Geagea, en pointe pour la consolidation
d’un foyer chrétien au Liban, passe, à tort ou à raison, pour avoir
été l’un des principaux fossoyeurs du leadership chrétien libanais,
que cela soit par ses raids contre le fief de la famille Frangieh, à
Ehden, contre les milices chamouniennes du Parti National Libéral ou
enfin contre l’autorité du premier ministre intérimaire de l’époque,
le Général Michel Aoun.

Curieuse façon de confier à des féodaux la défense de la démocratie,
Curieuse façon de confier à ceux qui seraient - n’était-ce l’amnistie
amnésiante- des « criminels de guerre » le soin de pacifier le pays,
de rétablir la concorde nationale et de faire régner une justice
impartiale au bénéfice de tous.

Curieuse façon de prendre exemple sur la France, elle, dont les
gazettes bruissent de ténébreuses affaires sur une instrumentalisation
de la justice à des fins partisanes, comme ce fut le cas dans
l’Affaire Mehdi Ben Barka, non résolue quarante après sa survenance,
dans l’affaire du juge Bernard Borel ou encore dans l’affaire
Clearstream. Passons. Il est admis, qu’à propos du Liban et des
dirigeants Libanais, nous ne sommes pas à une contradiction près.

Lamentable est votre incapacité au dialogue et indigne le spectacle de
l’étalage de vos divisions.... comme une parfaite illustration de
votre absence de considération pour un pays que vous avez allégrement
sinistré, et, pour un peuple que vous avez considérablement démuni par
vos querelles incessantes.

Inamovibles responsables du destin du Liban, votre singulière
conception du politique explique pour une large part votre incapacité
de proposer une réelle perspective de sortie de crise, au mépris de
l’intérêt général du pays. C’est bien là, une preuve supplémentaire,
du peu de cas que vous faites des véritables préoccupations d’une
large partie de notre peuple, notamment la fraction la plus démunie,
la plus désemparée.

Que la diplomatie française tente de suppléer vos carences ne vous
exonère en rien de vos responsabilités. Son implication répond d’abord
à son souci de préserver ses intérêts de puissance, c’est-à-dire à
préserver l’un de ses rares points d’ancrage qui lui subsiste dans le
monde arabe, en visant au premier chef à atténuer le caractère
abusivement personnalisé des relations d’Etat sous la précédente
magistrature.

Son hospitalité n’est pas fortuite. En filigrane de la réunion de
Saint Cloud se profile l’élection présidentielle de 2007, dans sa
version libanaise, avec notamment la volonté des grands électeurs que
vous avez habitués à décider de votre sort, à peser sur le choix
final.

En 1958, au sortir de la première guerre civile libanaise, à l’ombre
des marines américains, le Général Fouad Chéhab, a été porté à la
magistrature suprême. En 1982, ce fut au tour des deux frères Gemayel,
Bachir et Amine, record familial mondial absolu, d’y accéder à l’ombre
des blindés israéliens. En 1989, avec a guerre contre l’Irak, ce fut
au tour d’Elias Hraoui, puis d’Emile Lahoud, d’y accéder sous
l’ombrelle syrienne.

Quid de l’édition 2007 ? Une remake de 1982 avec l’investiture du
successeur de Bachir Gemayel, sa copie conforme, le chef milicien
Samir Geagea, avec le soutien du couple franco-américain ou le Général
Michel Aoun, dans la lignée militaire du Général Fouad Chehab ?

Les tentatives visant à impliquer la France dans les conflits
inter-libanais, c’est-à-dire à en faire l’alliée d’un camp au
détriment de l’autre, pourraient être contre-productif tant pour la
France que pour le Liban, car -l’expérience l’enseigne- elles
placeraient le pays hôte en opposition frontale avec l’un des
protagonistes libanais, en contradiction avec son objectif recherché.

La démocratie ne se préserve pas à coups de faux semblants et de faux
fuyants et le sort funeste réservé aux comparses irakiens Ahmad
Chalabi et Iyad Allaoui de l’aventure américaine en Irak, devrait vous
inciter à de salutaires méditations sur les sources intellectuelles de
la conviction et la pérennité des amitiés en politique.

Le propos est d’expérience et témoigne de la fiabilité du discours
occidental. Qui se souvient encore que, sous couvert de « lutte contre
le terrorisme », l’actuel premier ministre libanais Fouad Siniora et
le chef druze Walid Joumblatt, avant son retournement et son
ralliement au camp américain, ont été interdits de séjour aux
Etats-Unis pour avoir critiqué l’intervention américaine en Irak et
contribué à des œuvres caritatives chiites. Les voilà, trois ans plus
tard, objet de tous les égards et promus au rang de défenseurs de la
démocratie et de la modernité. N’est dupe que celui qui veut bien
l’être.

Au-delà de la réunion de Saint Cloud, il vous incombera de prendre la
mesure de l’impérieuse nécessité d’un changement profond touchant
toutes les sphères de la vie politique nationale, à commencer par la
refonte de l’Etat, la redéfinition des missions stratégiques de
l’armée nationale, longtemps confinée à un rôle répressif de
super-gendarme, et son articulation avec la Résistance nationale, dont
les faits d’armes ont valu au Liban et aux Libanais prestige et
considération dans de larges fractions de l’opinion occidentale et
dans l’ensemble du tiers-monde.

Tout autre comportement serait indigne du Liban. Indigne des
sacrifices qu’il a consentis pour demeurer à l’avant-garde du combat
pour la satisfaction des aspirations légitimes du monde arabe, à
l’avant garde du combat pour la maturité démocratique arabe.

Cette lettre vous est adressée le 12 juillet 2007 qui marque le
premier anniversaire de la guerre déclenchée par Israël contre le
Liban et des bouleversements psychologiques et stratégiques qui se
sont ensuivis avec le revers militaire israélien. Plutôt que de vous
épuiser dans une nouvelle guerre de religion (chrétiens/musulmans,
sunnites/chiites), avec en toile de fonds le désarmement des milices,
vous seriez plus avisés de consacrer votre énergie à obtenir
condamnation d’Israël pour sa violation du droit humanitaire
international, à obtenir réparation des dommages infligés au Liban par
l’usage des armes prohibés.

Il nous paraît curieux que ce point soit absent du débat public
libanais, signe d’une certaine amnésie ou d’une certaine connivence ?

Non à la division des Libanais, Non à un candidat de la division

Dans un souci de concorde nationale, nous récusons d’avance tout
candidat à la magistrature suprême dont les mains sont souillées du
sang de libanais, tout candidat dont la fortune s’est constituée des
rapines de la guerre. Il ne saurait y avoir de prime à la forfaiture
sous couvert d’Unité nationale.

Solidaires de la souffrance des Libanais et de l’injustice qu’ils
subissent, nous condamnons vivement l’assassinat du premier ministre
Rafic Hariri, avec la même vigueur que nous condamnons l’assassinat du
premier ministre Rachid Karamé, l’assassinat du chef druze du parti
socialiste Kamal Joumblatt, comme celui du dirigeant communiste
Georges Hawi, comme celui du dirigeant milicien Dany Chamoun ou du
dirigeant nationaliste arabe Maarouf Saad.

Nous condamnons également avec la même vigueur l’assassinat du
journaliste Gébrane Tuéni et de Samir Kassir avec la même vigueur que
celle de Nassib Metni, celle du député Pierre Gemayel avec la même
vigueur que celle du député Tony Frangieh, décapité avec l’ensemble de
sa famille, dans son fief du Nord Liban chrétien.

Nous condamnons la disparition des 18.000 personnes anonymes et
innocentes du conflit inter-libanais et déclarons notre solidarité
avec les familles des 200.00 victimes et 1,5 millions blessées ou
handicapées de même que tous les suppliciés de Damour, Cana,
Sabra-Chatila et Tall-Zaatar.

Il ne saurait y avoir une hiérarchie dans la mort, de la même manière
qu’il ne saurait y avoir d’appréciation positive ou négative des
victimes sur le seul critère de leur proximité avec l’Occident ou
l’Orient.

Nous rejetons donc énergiquement tout facteur de division, tout
candidat de division quelque soit le soutien dont il bénéficie tant
des protagonistes sur le terrain que de leurs parrains respectifs.

L’effort français ne doit pas dispenser les Libanais à faire preuve de
maturité politique en songeant à se dégager, dans les meilleurs
délais, ne serait-ce que pour les générations futures, de la tutelle
de fait qui leur est imposée de part et d’autre, en vue de s’insérer
sans retard, en tant qu’acteur principal, au cœur du processus
historique de reconstruction du Liban en rapport avec son
environnement arabe.

Paris, 12 juillet 2007

***


Signataires


Dans l’ordre alphabétique

 Ameen Alsayeg Khadija - Bahrain
 Assaf Georges, directeur commercial - Liban
 Assaf Jaber Solange, secrétaire comptable - Liban
 Assaf Mylène - Liban
 Atallah Salim, secretary and information officer - Liban
 Attoui Alin, industriel - Tanzanie
 Attoui Amal, galériste - Côte d’Ivoire
 Awad Miguel, ingenieur - USA
 Awad Thérèse, - USA
 Berbery Michel, conseiller commercialisation - Canada
 Bizri Hala, bibliothécaire - Liban
 Chaitou Saïd Sami, négociant international - France
 Chammah Sahyoun Christiane, éducatrice spécialisée - Liban
 Charara Rima, assistante en relations extérieures - Sénégal
 Charif Dima, journaliste - Liban
 Debs Marie, enseignante - Liban
 El Cheikh Jean, médecin hématologie et transplantation - France
 El Eid Amine, médecin - France
 El Yafi Ghada, médecin hématologue - France
 Farhat Dyana - Liban
 Frayfer Jamil, médecin - France
 Freifer Nadimé, employée territorial - France
 Ghanem Charbel, architecte et chef de projet - France
 Hadadah Ali, doctorant en économie de l’environnement - France
 Haroun Ziad Noel, étudiant - Liban
 Karam Charbel, fashiondesigner - Liban
 Khalaf Hassan - Tanzanie
 Khayat Sabri, syndicaliste - Canada
 Khazma Omar - Liban
 Koubaissi Zeinab, social worker - Sweden
 Mortada Wael - Liban
 Naba René, journaliste écrivain - France
 Rez Issam - France
 Richa Raoul, enseignant - France
 Richa Raymond, ingénieur - France
 Richa Roland, sociologue - France
 Sabbah Hussein, ingénieur - France
 Safieldine Lamia, chorégraphe - France
 Shilik Marcelle - Liban
 Stephan Maud, professeur - Liban
 Tabbal Bruno - Liban
 Younnes Fouad - Liban


Rencontre interlibanaise du 14 au 16 juillet à La Celle-Saint-Cloud

Une rencontre "informelle" interlibanaise se tiendra les 14, 15 et 16
juillet au château de La Celle-Saint-Cloud (Yvelines) à l’initiative
de la France, a annoncé vendredi 05 juillet, la porte-parole du Quai
d’Orsay.
Cette rencontre débutera le 14 juillet à 15h30 et sera clôturée le
lundi 16 juillet à 10h par une conférence de presse du chef de la
diplomatie française Bernard Kouchner, "meneur des débats", a précisé
Pascale Andréani à la presse.
La réunion rassemblera des représentants des forces politiques
associées au dialogue national libanais ainsi que de la société
civile, a-t-elle expliqué sans fournir la liste des participants ni le
nombre des personnes attendues.
La porte-parole a simplement indiqué que la rencontre, dont la
préparation a donné lieu à des déplacements de l’émissaire français
Jean-Claude Cousseran au Liban, compterait entre 30 et 40
participants. La présence du Hezbollah "ne pose pas problème",
a-t-elle déclaré en réponse à une question. "C’est un acteur de la vie
politique libanaise. Il est invité à ce titre".
Les débats sous l’impulsion de M. Kouchner seront "centrés sur le
nécessaire renforcement de l’Etat libanais", a souligné Mme Andréani,
insistant sur le fait qu’il ne s’agissait "ni d’une conférence
régionale ou internationale ni d’une session de dialogue national" sur
le modèle de celui initié en 2006.


Le Hezbollah participera à la conférence interlibanaise en France
malgré les critiques de Nicolas Sarkozy

Le Hezbollah participera ce week-end près de Paris à une conférence
interlibanaise, bien que le président français Nicolas Sarkozy ait
qualifié de "terroriste" cette organisation, ont annoncé mardi des
responsables du Hezbollah.
M. Sarkozy a tenu ces propos lundi 09 juillet en recevant les familles
de trois soldats israéliens enlevés par des groupes armés, dont deux
par le Hezbollah l’été dernier. Ce mouvement n’a pas donné
d’informations sur l’état de santé des deux soldats et on ignore même
s’ils sont toujours en vie.
Les propos du président français ont quelque peu surpris dans la
mesure où la France a invité le Hezbollah à participer à cette
conférence qui doit rassembler 14 factions libanaises ce week-end. Il
s’agira de la première fois depuis plusieurs mois qu’elles se
rencontreront pour chercher des moyens de mettre fin à la crise
politique qui secoue le Liban. La France entretient des liens étroits
avec plusieurs factions et espère utiliser son influence pour relancer
le dialogue.

Mohammed Fneish, un ancien ministre du Hezbollah qui représentera son
organisation aux pourparlers, a confié à la télévision Al-Manar qu’il
irait à Paris avec "un esprit ouvert pour discuter de toute
proposition". Il a minimisé l’importance des remarques de M. Sarkozy.
"Les Français savent très bien par leurs contacts avec nous que nous
sommes un mouvement de résistance", a-t-il dit à la télévision du
Hezbollah.
Pascale Andreani, porte-parole du ministère des Affaires étrangères, a
fait savoir mardi que la France avait maintenu son invitation au
Hezbollah, soulignant notamment qu’il s’agissait d’une force politique
importante au Liban.
"L’objectif" est "que le Hezbollah renonce à l’action terroriste",
avait déclaré lundi Nicolas Sarkozy, selon son porte-parole David
Martinon. Alors qu’on lui demandait si le président avait qualifié le
Hezbollah libanais de "terroriste" pendant cette entrevue, M. Martinon
a répondu : "oui". "Il a complété en disant que son objectif était que
le Hezbollah renonce à l’action terroriste et redevienne un parti
politique presque comme un autre, qu’il joue le jeu de la démocratie
parlementaire" libanaise.
La France organise ce week-end une rencontre "informelle"
interlibanaise au château de La Celle-Saint-Cloud (Yvelines). La
réunion rassemblera des représentants des forces politiques associées
au dialogue national libanais ainsi que de la société civile.