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Une nouvelle guerre de 100 ans ? Ou le combat continu !
Article mis en ligne le 20 février 2024
dernière modification le 29 janvier 2024

Introduction à la question de la guerre, sa finalité tente de démontrer que toute guerre et une guerre civile mondialisée.

Introduction

Depuis des mois, l’actualité nous submerge. La gestion de la Covid avec son cortèges de mensonges d’état et de remises en cause de l’état de droit, exercice concret du capitalisme de surveillance, débuta une série préoccupante.

Avec la chute du mur de Berlin (1989), nous pensions le feuilleton guerrier clos.

Déjà, le conflit du Kosovo (mars 1998-Juin 1999) avait ramené la guerre dans l’espace européen. L’Europe endormie subit un nouveau choc lors de l’invasion de l’Ukraine par son voisin russe.

Enfin, le pogrom du 7 octobre 2023, réveilla le pire. Les séquelles de la IIème guerre mondiale rejaillissaient dans toute son horreur. Le " Plus jamais ça " avait tort une nouvelle fois.

Depuis nous pataugeons dans les images oubliées, les peurs enfouies. Les débats séculaires reforment une écume sanglante.

L’évènementiel engloutit nos esprit et notre temps. Le piège journalistique se referme, les idéologies s’affrontent de nouveau. L’émotionnel prend le dessus sur la réflexion, la recherche et le débat d’idées. Je propose que nous prenions un peu de recul, de distanciation indispensable des courants contradictoires des émotions.

La guerre rompt avec les bisbilles politicards et nous propulse dans une autre dimension.

Le cœur bouleversé, mais la tête froide, affrontons l’universel de la guerre.

Y a-t-il eu une période historique sans guerre ? La question invite les historiens et les philosophes à plonger dans la noirceur ou pour certains la grandeur de l’homo sapiens.

La problématique renvoie à celle plus générale de la violence. L’usage de la guerre comme métaphore sert à désigner l’hostilité généralisée entre les individus et les groupes : de la horde primitive aux états "dotés".

L’absence de conflits guerriers ou de violence relève de la narration mythique : Éden, le Bon Sauvage… Les passions, les intérêts, les aléas de l’histoire, la haine constituent les fondations humaines, trop humaines.

On sait que la guerre passionne les médias et que les thuriféraires de la paix se vautrent dans leur péché mignon. Chaque période guerrière nous gave de récits des "honorables correspondants de guerre" (dont certains ne quittent pas les palaces enfumés des capitales), d’analyses d’experts diplômés et de militaires à la retraite ravis de ramener leur science et de tristes appels à la "charity business". Le malheur des uns fait le bonheur des autres .

La guerre nous place devant une difficulté majeure. Sa factualité capte l’attention et le ressenti (ou le sentimentalité). Par nature, le fait est incomplet, une sorte de sélection d’un moment du réel. La factualité devient "matière" à dire donc à écouter, elle raisonne (résonne aussi) dans l’esprit et le corps (Arendt). on peut parler de texture factuelle du fait-guerre (Géraldine Muhlmann).L’énonciateur, de fait, joue le rôle du prêtre, du gourou, du maître es-propagande.

"Tout fait se manipule aisément" l’évidence s’impose sans trop de frais.
Donc :

" Il n’y a pas de faits, rien que des interprétations (G. Muhlmann)"

Ricœur nous a longuement prévenu de la difficulté (cf. De l’interprétation).

Autre conclusion :

Le globish (le langage des culpabilisés de la langue maternelle et des feignasses lexicales) "fake news" et "deepfake" (un trucage via l’IA) entrent dans nos mœurs et nos esprits imbibés de news et d’alertes. La prolifération numérique et écranique n’innove pas, mais accélère et crédibilise la prolifération des faits.

Nous sommes dans l’ère de l’oralité médiée et de l’écriture ChatGPTisée.

Le discours sur la guerre et le discours de guerre se mêlent sans vergogne.

La plus haute vigilance est de mise.

Le BROUILLARD DE LA GUERRE.

Cet article, centré sur la l’objet-guerre, ne traite pas de la violence, thème plus large, dont il n’est, hélas, qu’un diverticule paroxysmique. En guise de mise en bouche, je conseille la lecture des deux articles suivants :

Définir l’objet-guerre : Polémos et Stasis.

L’étymologie grecque apporte un premier éclairage. Polémos concerne l’activité guerrière extérieure et Stasis, le cache-misère de la discorde, de l’émeute interne à la Cité, de l’instabilité du monde réel face à l’idéal rêvé.

Les deux acceptions, dès l’origine occidentale, sont liées nécessairement à la politique. La Stasis prend un caractère encore plus monstrueux, car monstruosité du vivre-ensemble.

Rien d’étonnant que la guerre occupasse une place fondamentale dans l’histoire et dans la pensée philosophique, d’ailleurs, souvent d’une manière honteuse ou apologétique.

Les considérations suivantes ne constituent pas un traité de la guerre à l’usage des jeunes et moins jeunes libertaires, mais un introduction et aussi une invitation à partager une recherche délicate. L’auteur avoue ses faibles historiques et dans le domaine de la psychologie profonde du fait-guerre. D’ailleurs, la guerre " réquisitionne ", par son université, toutes les palettes
des connaissances.

Polémos.

Premiers écueils. L’étude de la guerre ne se confond pas avec la doctrine et l’art opératif réservés aux képis passés par les Écoles de guerre.

Ne jamais oublier que les penseurs et les stratèges appartiennent à leur temps. La contextualisation reste indispensable. Toute guerre est historique et géographique.

Penser la guerre suppose une réflexion au long-cours afin de tenter de mettre en évidence des invariants. La guerre n’est pas un concept, mais une action déterminée dans le temps et dans l’espace.

Définitions.

Notre démarche s’appuie sur un impératif : éviter le piège sémantique réducteur. Quelques approches pour définir la guerre :

D’abord, ne pas commettre la l’erreur courante de réduire la guerre à une violence ordinaire. Ne pas oublier que la comparaison avec une lutte corps à corps de type duelliste esquive la vraie nature de polémos.

La guerre est une relation d’État à État, les particuliers (lire troupiers) ne sont ennemis que contraints (Rousseau). C’est un conflit entre ensembles constitués régi par des lois et des valeurs. De façon directe ou indirecte, la guerre engage le corps social. Elle a un prix et une économie particulière.

La guerre engage le corps social. Avant la conscription, la guerre avait déjà un prix et même une économie. L’équipement, la logistique et le sang étaient déjà au rendez-vous. Colbert créa les "Eaux et Forêts" afin de disposer de bois de charpente marine pour la génération suivante. Sus à l’Anglais impérialiste !

" Un acte de violence destiné à contraindre l’ennemi à exécuter notre volonté " (Clausewitz)

C’est une lutte externe universelle de type darwinien. Elle pratique donc une sélection. Le vainqueur prétend dicter sa souveraineté ou tirer un profit quelconque de sa victoire. Mais, elle peut être aussi un jeu " À qui perd gagne ! "
Gaston Bouthoul, le fondateur de la polémologie, insiste sur la nécessité d’éviter les amalgames. L’histoire des guerres n’est pas celle de la guerre. Chaque conflit armé possède sa rationalité, ses règles et une logique propre.

De l’escarmouche (incident de frontière par ex.) à l’extermination pure et simple. Elle est une ascension progressive ou foudroyante aux extrêmes. Faire la guerre pour la guerre serait une absurdité. La fin détermine toujours les moyens et la clause de la cessation des combats.

" Le belligérant doit tirer ses troupes de ses citoyens " (Machiavel)

Le recours aux mercenaires montrent la faible de l’État ou sa duperie. L’auteur du " Prince " place, comme Clausewitz, la guerre dans la continuation de la politique. Mais le militaire prussien connut les guerres napoléoniennes et sut élargir ses réflexions. Les Alliances entre pays prirent à cette époque une importance jamais connue. L’Europe s’embrassa, la noblesse d’épée lutta contre les gueux

Formes et structures de la guerre.

Le discours sur la guerre théorique ne reflète jamais la guerre réelle. Avec cette maxime, Clausewitz bouscule la tradition, comme Tocqueville le fit dans son domaine. Il sort la théorie de la guerre de sa gangue " Grandeur de et de Gloire " de la noblesse dont le prince ou parfois le souverain était investi de facto du commandement suprême. Les théories issues des Anciens n’ayant pas résisté à l’innovation du caporal Bonaparte, Clausewitz passa sa vie à disséquer les stratégies des armées révolutionnaires. Au de-là, des analyses circonstanciées, il parvint à esquisser une théorie de la guerre qui reste d’actualité.

Le discours sur la guerre est le témoin privilégié de la représentation d’une époque. Son étude est donc indispensable à la compréhension de l’histoire comme roman de la guerre. L’histoire humaine est celles de ses guerres.

L’interprétation des discours et des faits épurés des scories permet de restituer les enjeux idéologiques et de s’approcher du réel voilé par le temps.
La guerre réelle in situ comporte toujours des phénomènes non-militaires.

La guerre peut être impériale, révolutionnaire, coloniale ou de libération, offensive, défensive, religieuse, économique…. Chaque type induit des méthodes et des modalités particulières traitement. Donc, une difficulté centrale de mobiliser les connaissances dispersées dans diverses spécialités.
Elle a pour dynamique l’échange matériel ou symbolique : territoires, accès à la mer, mines, hydraulique…

Guerre civile locale ou généralisée occupent un champ d’étude spécifique. Voir la partie sur Stasis.

Depuis longtemps la guerre est le mode de résolution de conflits entre États constitués (monarchie, empire, nation). Pas de guerre sans but. Même les pirates ou les Seigneurs de la guerre agissent en vue d’un bénéfice sonnant et trébuchant. Ce but peut se cacher derrière une ruse ou plusieurs manoeuvres étranges. Si bien que l’étude des guerres présente une grande difficulté si l’on veut échapper à la doxa historienne et idéologique. Ex. La guerres des paysans ou la guerre de Sécession.

Il n’y a pas de guerre sans organisation, sans structure et sans hiérarchie. Elle s’appuie sur un corps social spécialisé est une formation longue de plus en plus technique et spécialisé.

Les sociétés primitives sont d’abord du social, en cela elles diffèrent peu des sociétés contemporaines. Il faut mettre l’angélisme et le rousseauisme au rencard. L’être-pour-la guerre (Clastres) prédomine.

Société Guerre

Sa lisibilité est délicate pour l’ethnologue qui arrive toujours toujours après "la bataille", le drame de la prise de contact avec le prédateur universel occidental.
Beaucoup d’anthropologue trimballe leur pathos, la rencontre avec le cannibalisme démontre parfaitement le propos. A regarder de prêt, le cannibalisme n’est ni une cause ni un but de la guerre. Il n’a pas de cause alimentaire, mais symbolique.

La guerre est toujours liée à deux paramètres fondamentaux : la démographie et la géographie et l’armement lié à un mode de production et à une technologie appliquée.

Guerre et paix.

Attention aux contresens moralistes.

La guerre ne vise pas la paix définitive et universelle ce qui serait une hypocrisie absolue et s’appuierait sur une dictature éternelle. S’ouvre, ici, l’énorme question de la paix, du pacifisme, de la violence légitime, de la contre-violence et de la non-violence.
Comme la guerre, la paix est étroitement connectée au politique. A ma connaissance, la paix réelle n’a pas encore trouvé son Clausewitz. ( Je ne fais pas l’impasse sur Kant)
Le dualisme irénique Guerre/Paix ne permet pas de sortir du moralisme hypocrite ambiant.
Toute paix est transition entre deux guerres : le temps de reconstituer des forces… ce qui prouve deux choses :
 1) Soit que la paix est une guerre en sommeille.
 2) Que la guerre mérite parfaitement le qualificatif d’universel premier.

L’irruption du droit, plus tard du droit international et du droit de la guerre n’a pas améliorer la situation. Juste permis à des fonctionnaires, bardés de diplômes et de bonne-conscience, de vivre confortablement. Ils n’iront pas au front. Le modernisme et le progressisme n’apporteront pas de solution, si ce n’est que rendre les armes encore plus létales et la mobilisation mondiale.

Paix, il faudrait préférer le terme de non-guerre. De plus, la non-guerre ne sera jamais la paix, il y aura toujours une connexion entre les deux termes du dualisme.

La guerre et la paix sont des relations d’États, conséquence logique de la définition de la guerre.

Fausse guerre et fausse paix, du genre " guerre froide ", diminue peut-être le carnage, mais exacerbent la guerre idéologique et économique.

La paix comme " contre-guerre " : géniale idée de la dissuasion nucléaire. " Les parapluies de Cherbourg " comme métaphore filmique. La force réelle ou potentielle remplace la violence guerrière, mais ne supprime pas ses autres modes d’expression.

Cette violence quasi invisible devient droit du plus fort tacite, une sorte d’épée de Damoclès technologique ?

Le Pacifisme, forme politique mensongère utilisée pour cacher la misère et la lâcheté de la classe politique acculée dans ses retranchements.
L’absence de polémos et de stasis implique le despotisme ou la dictature, disions-nous plus haut.

Le pacifisme possède deux courants : l’un de tendance anarchiste qui replace la responsabilité de guerre sur les États. L’autre se rattache à la théorie de la guerre juste. Il faudra planter sans peur dans ce débat.(terrorisme inclus).

Guerre juste, le grand fantasme des mains pures de Bodin au droit d’ingérence.
Guerre propre, les derniers conflits démontrent l’ineptie du concept.

Terrible constat. La guerre de Sécession officialise deux tendances lourdes de la modernité guerrière : la guerre civile intra-ététique et la population comme armes, boucliers, instrument de pression démographique et psychologique.

Art militaire : Stratégie, fin et moyen.

Depuis ses lointaines origines la guerre requiert un minimum de pensée opératoire. La horde s’organise organisée, une certaine forme de hiérarchie fonctionne.

Avec les nouvelles techniques, l’archéologie retrouve des sites de bataille.

L’art militaire repose sur une dialectique élémentaire de la fin et des moyens.
La stratégie se veut une science, donc reposant sur un savoir et une transmission.

Stratégie = science de l’action ou praxéologie. Elle est nécessairement pluridisciplinaire.

La Stratégie ne s’occupe que des actions volontaires concertées et finalisées, destinées à obtenir un gain politique.
La tradition définit la Tactique comme l’art de mener le combat, son efficacité repose sur la possibilité des officiers de commandement de prendre des initiatives. La trop forte autorité de l’État-major général (EMG) entraine souvent des dysfonctionnements. LA tactique n’apparaît dans l’histoire militaire que tardivement. Vers le XVII ème siècle, la combinaison : cavalerie-infanterie-artillerie exige la coordination des trois éléments.

Plus l’armement se complexifie, plus le couple Stratégie/Tactique devient impératif. L’apparition d’une marine de guerre à vapeur et puissante liée à l’aviation apporte un niveau de technicité rendant le Commandement une science indispensable. L’art opératif combine les deux disciples dans l’organisation des guerres de mouvements. Etrange, l’URSS et l’Allemagne furent pionnières en la matière dès les années 30. On parle d’opératique.

Guerre et politique forment un couple indissociable que Clausewitz sut mettre en évidence.
L’adage, " la guerre est le tribunal des princes " précède la célèbre formule de Clausewitz : " La guerre est la poursuite de la politique par d’autres moyens ". Avec les guerres napoléoniennes et leurs méticuleuses analyses par Clausewitz, la connexion guerre / politique s’affirme définitivement. La puissance de la conscription démocratise la guerre. La classe guerrière perd progressivement de sa superbe et le corps d’officiers émerge de la troupe et se spécialise. Les grandes guerres et leurs massacre entre dans l’histoire. Première étape décisive vers la généralisation de la guerre civile. L’enrôlement par le dragage des fonds d’estaminets cède le pas, la conscription signifie asservie et contrôle social. " La classe d’âge " remplace la classe sociale.

L’extension du domaine de la lutte sert de matrice à l’économie, à la gestion politique et sociale. L’étude de la guerre s’impose à tous penseurs ou mouvements ayant la prétention d’obtenir une fin. West-Point et Polytechnique symbolise ce tournant. Les élites étatiques et industrielles sortiront de ces rangs réputés d’excellence et rarement philanthropiques.

C’est le véritable Art de la Guerre. La complexification des armes et la mobilisation de plus importante de troupes imposent à la fois la spécialisation et la formation d’un commandement unifié (E-M général).

D’autre part, la Stratégie et les guerres coloniales démontrent que : " la géographie c’est la guerre ".
Métaguerre.

La métaguerre

La guerre s’appuie sur des socles au-delà de l’action, on peut parler d’une méta-physique de la guerre. La factualité, l’histoire, l’art stratégique ne suffisent pas à cerner complètement l’objet-guerre. Depuis la grécitude, on sait que derrière les sensations et les objets nichent un ou des " méta ".

Dans cet article, je me contente de présenter les axes de cette recherche. Chaque point mérite de longs développement. J’invite les volontaires à participer à cette entreprise. La bibliographie en fin d’article peut servir de bases.

Guerre et religions.

La connexion saute au yeux.

Deux exemples : " Tu ne tueras point " et la participation du Zen japonais à la guerre prouvent qu’un parcours méticuleux de cette évidence s’impose. Dans le système des castes, la question se complique. La caste guerrière (Kshatriyas), les moines-guerriers…montrent aussi le mécanisme de sacralisation de la violence (caractéristique des trois monothéismes) et sa spiritualisation dans les pensées orientales.

Toutes les religions et les disciplines spirituelles se heurtent, un moment ou un autre, à la fréquentation du pouvoir temporel. C’est le big choc, le D-Day dans le réel. La lecture, difficile à mes yeux de la Bhagavad-Gîta est un exemple. Imaginez Ben Hur sur son char philosophant sur sa position et les contradictions qui l’étreignent. Hélas, l’art cinématographique en moins.

Guerre et philosophies

La philosophie a largement épaulé et parfois mis à mal les religions. Les Lumières marquent un moment important dans l’émancipation de la philosophie par rapport à la religion (Kant)

Philosophie de la guerre.

Sujet rarement traité, si ce n’est par les chantres de la Violence libératoire  : Hegel, Marx et les sous-produits de la lutte des classes.

Avec le temps, la réduction de la guerre à des fins économiques ne résiste pas la capacité de mutation et de changement de paradigmes du Capital. Ce qui met les marxistes purs-port-d’attacche à l’arrière-garde du mouvement d’opposition radicale aux transformations du capitalisme.

Schématiquement, on peut distinguer plusieurs phases dans le développement du capital.

  1. La longue période de l’artisanat qui n’empêcha la construction navale indispensable aux commerces et aux guerres de conquêtes ou de défensives ( Grèce contre Perse). Le procès comme avec la pierre taillées.
    Avant les peuples, sans histoire, était des peuple-pour la guerre (Clastres). Ici, ne se déduit pas la violence interindividuelle.
  2. Suivit la phase pré-industrielle (armure, artillerie…) qui initia la modernité technologie. C’est le royaume de la mécanique et de l’industrie lourde (sidérurgie, chemin de fer). La mobilité des capitaux, des matières et des savoirs provoque une première vraie révolution. Relire Marx et les penseurs de la technique.
  3. La période numérique commencée dès les années 50 avec les premières avancées de la cybernétique
  4. La phase actuelle de l’I.A, nouvelle révolution industrielle, politique et sociale dont on mesure à peine les conséquences et les convulsions politiques et sociales. Sans oublier les contradictions internes que analyse du néoTot met en évidence.

A chaque période du développement historique et économique correspond des théories de la guerre différenciée. Son étude devrait faire partie intégrante de l’histoire et de la philosophie y compris dans les milieux pacifistes souvent ignorants des fondements de leur crédo.

La dualité violence / guerre prend, elle aussi une nouvelle dimension. J’attire l’attention que quatre auteurs Éric Weil, René Girard, Michel Maffesoli (malgré les vives critiques dont il est l’objet), Jean Vioulac (Cf les recensions dans Divergences).

Les philosophes et la guerre.

Cette introduction ne permet de longs développements sur le lien étroit, souvent ambigus, des philosophes avec la guerre. Kant et Hegel tiennent la tête du peloton d’exécution, notamment Hegel, grand promoteur de la confrontation interne maître/esclave (ré-introduction de la guerre civile dans le corpus philosophique. Ses billevesées auront une paternité mortifère.

Donc, en projet un article spécifique sur une histoire de la guerre en philosophies, comme toujours la filousophie guette. Hermann Cohen et Heidegger retiendront notre attention, la germanitude réserve toujours des surprises.

Esthétique de la guerre.

D’abord, la guerre depuis les grands maîtres de la grécitude ou les textes majeurs du monothéisme prend une place important.

Les arts nous rappelle son importance et la fascination qu’elle inspire.
Peinture, musique, sculpture, cinéma reprennent sans cesse le thème.

Le cinéma aborde tous les thèmes que nous venons d’esquisser. Cela mérite de longues analyses d’oeuvre, de ses origines (Napoléon d’A. Gance à Avatar).

Ernst Jünger occupe une place importante dans la glorification de l’horreur et sa description dans Orages d’Acier. 1922, il publie Le combat comme expérience intérieure. Après la IIème guerre mondiale, il penche pour un individualiste anarchisant et se dit même lecteur et admirateur de Stirner.

Les principaux thèmes de l’esthétique guerrière : la fraternité, la mort, le dépassement, le sacrifice, la souffrance, l’absurdité, la révolte…

Un peu de poésie :

L’ADIEU DU CAVALIER
 
Au Dieu ! que la guerre est jolie
avec ses chants ses longs loisirs
Cette bague que je l’ai polie
Le vent se même à vos soupirs.
 
Adieu ! voici le boute-selle
Il disparut dans un tournant
Et mourut là-bas tandis qu’elle
Riait au destin surprenant
FUSÉE (extrait)
 
Le riz a brûlé dans la marmite du campement
Ça signifie qu’il faut prendre garde à bien de choses
 
Le mégaphone crie
Allongez le tir
 
Allongez de tir amour de vos batteries
 
O vieux monde du XIXème siècle plein de hautes cheminée
si belles e si pures
 
Virilité du siècle où nous sommes
O canons
 
Douilles éclatantes des obus 75
Carillonnez pieusement

Apollinaire in Calligrammes

Stasis.

Mettre sur le même plan polémos et stasis peuvent étonner. Cela mérite une rapide mise au point et annonce une réflexion théorique fondamentale sur la primauté de guerre civile, soit Stasis comme présupposé de Polémos.

Définition et amnésie.

Paradoxalement Stasis signifie le repos, la continuité, l’immobilité, bref ce qui est éternel, intangible. Il s’oppose à Kinêsis, le mouvement. Toutefois, appliqué à la Cité, on constate que les penseurs "oublient" le sens premier qu’ils transforment en fantasme. C’est cette amnésie, cette disparition qu’il faut interroger. (Cf Ninon Grangé Oublier la guerre civile  ?)

Dans la cité, lieu privilégié de la grécitude, règne la politique à l’ombre du mode de production esclavagiste et des gynécées. En somme, la politique est depuis lors une mâlitude béate.
Mais intra-muros, la Stasis subit les outrages de l’oubli et de la transgression. C’est le lieu officiel de la divergence, de la
dispute, de l’affrontement entre factions.

Bref, la guerre de tous contre tous ou des groupes (sectes) les uns contre les autres.

La lutte intestine au coeur de l’organe nourricier de la vie en commun rappelle la sortie de l’Eden. Nous sommes bien dans un syndrome méditerranéen, plus qu’aucun donc universel.

Le théâtre grec mat en évidence la cité comme le lieu de l’invective, de l’exclusion. Les joutes oratoires sur la vie de la Cité, l’interprétations de oracles, des mythes et des dits philosophique dérivent souvent vers des troubles internes violents.

De la guerre interne à la Polis, à la Politia (Aristote, l’état idéal) correspond la guerre intérieur en chacun.

Stasis et Politia : les deux fantasmes de pureté, de vérité de la grécitude. Comme quoi l’idéalisme induit la transgression, la Loi, désobéissance.

Stasis est plus guerre que Polémos, car elle met en péril la cité même ; c’est la peste intérieure.

Retour au présent.

Aujourd’hui, de nouvelles sources d’" oubli de la Stasis et de la Politia " prennent le relais. Les partis politiques remplacent les factions, les contradictions de la société civiles incarnées par les syndicats et les proliférations associatives, le communautarisme et le culte de l’identité s’ajoutent au rififi entre citoyens policés.

Les techniques modernes perfectionnent les mécanismes de la discorde. La stasis (transcendance) se retire au profit d’une immanence de plus en plus plurielle. Les mécanismes d’individuation, mis en évidence par Tocqueville, mènent un combat farouche contre les pulsion holistes. Le sociétal tente de redorer le blason d’une Stasis utopique.La multiplication des conflits( ville/campagne, jeune/vieux, exploités/exploiteurs, Nord/Sud…).

Hors de la sphère occidentalisée, le tribalisme, les manipulations des grandes puissances montrent aussi que la Stasis n’est même plus un souvenir.

Après 1945, Polémos se délocalise mondialement et le refoulement de la Stasis engendre la guerre civile interne comme schéma directeur du fonctionnement de l’être-au-monde-politique.
La décolonisation perpétue le modèle des guerres coloniales et imposent les conceptions fondamentales de l’occident : territoire (sédentarisation), nations aux frontières ineptes, dislocation des empires par fragmentation manipulée…

La puissance des techniques générales développe les nouvelles guerres : climats, espace, droit international à la dérive, déclin des institutions nées de la chute du IIIème Reich, guerre économique, guerre de classes, guerre de propagande, la propagande devenue réseaux sociaux.

Les institutions internationales issues de 1945 reflètent l’oubli de la stasis en se fonctionnarisent comme bonne conscience. Le "Machin" pompe le fric comme nos Shadocks. Les bons sentiments au prix du verbiage policés.
Le fantasme de paix (droit, ONU) favorise les néo-guerres : guérillas, conflits délocalisés permettant de maintenir des forces armées professionnalisées.

Le grand rêve de la guerre propre par machines interposées permet de revenir à des budgets militaires parés de vertus humanistes. Le combat de drones serait le retour aux joutes d’antant. L’IA comme effectuation de la Paix par la domestication généralisée.

Le néoTotalitarisme avance ses pions. Ne ratons pas le train de l’histoire. Cours, camarade, le temps est décompté !

INCLUSION : Et Nous…et Nous… dans la guerre civile permanente.

La transformation radicale de la mondénaïté entraîne de lourdes conséquences, trop souvent refoulées dans les miasmes des luttes anciennes.
C’est bien connu, c’était mieux avant, thèse conservatrice largement répandue y compris dans les milieux d’avant-garde.

N’oublions pas que le capitalisme se nourrit des tensions qu’il génère.
Les luttes coutumières sont maintenant des rites pavloviens, des instruments de la Machination. Tout est devenu Marchandise monnayable ou symbolique.

La disparition de la conscription prive l’antimilitarisme de son mode d’expression favori, et encore combien d’insoumis, d’objecteurs de conscience, d’apostat du patriotisme ? Les chiffres font honte.

A nos dépends, nous savons maintenant que le soutien inconditionné aux guerres de libération dissimule un penchant à la facilité et un aveuglement sur les enjeux cachés, mais réels des conflits.

Reste qu’il faut à nouveau se pencher sérieusement à question de la collaboration passive, à élaborer " un art opératif " capable de relier une pensée nouvelle adaptée au capitalisme de surveillance et d’intégration (stratégie) à des tactiques aptes à s’adapter aux contre-mesures de la Machination et d’innover sans cesse en sortant de son passéisme moribond. De plus, l’actualité capte nos énergies, mais voile aussi l’essentiel.

Lutter contre la violence et ses formes paroxysmiques implique aussi de passer au crible les fondements et les dérives des Droits, de la désobéissance civile devenue un prêt-pensé. La non-violence, elle-aussi, doit aussi s’interroger sur elle-même. Nombres de pratiques actuelles se revendiquant d’elles, offrent un triste spectacle de réification de bien-pensance et de bienveillance troublante.

Éthique et anarchie : deux thèmes qui nous attendent au coin de la rue.

Question finale :

Qu’est-ce qui fait que l’on tue encore malgré les crédos et les " plus-jamais-ça "

Lecture salutaire :

« On croit que les sociétés nouvelles vont chaque jour changer de face, et moi j’ai peur qu’elles ne finissent par être trop invariablement fixées dans les mêmes institutions, les mêmes préjugés, les mêmes mœurs, de telle sorte que le genre humain s’arrête et se borne ; que l’esprit se plie et se replie éternellement sur lui-même sans produire d’idées nouvelles ; que l’homme s’épuise en petits mouvements solitaires et stériles ; et que, tout en se remuant sans cesse, l’humanité n’avance plus. »

Tocqueville. [1]

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Henri Hude Philosophie de la Guerre, Economica, 2022, 122 pages.

Marx - Engels Écrits militaires, L’Herne, 1970, 661 pages.