1
Un savon tout nu réfléchissait
auprès d’une mare d’eau très sale quand il décida :
« Je vais attendre et me marier avec la pluie. »
2
Un marteau tapait sur un clou qui,
après s’être enfoncé au cœur du bois, lui dit :
« C’est malin ! Tu es seul maintenant. »
3
La clé qui ouvrait et fermait la porte lui cria :
« Sans moi, tu ne serais qu’une porte battante.
– Qui dort dans le lit de ma serrure ? », grinça la porte.
4
La main prit la taille d’une bouteille d’eau minérale
qui se pavanait fièrement sur la table en pétillant.
Deux lèvres la vidèrent d’un trait.
5
Les chaises se plaignaient de ne recevoir que des culs.
« Soyez heureuses, leur dit la cuvette des toilettes,
vos invités ne se déculottent pas. »
6
Le ciel noir de la nuit jalousait le ciel bleu du jour
qui lui dit : « Tu sais, je suis quelquefois couvert de nuages,
mais jamais je ne peux arborer les étoiles comme toi. »
7
La vie se plaignait de sa dureté à la mort.
« Que dois-je dire, moi, qui n’ai ni repos ni vacances ? »,
répondit la deuxième.
8
« Tu prends des risques en traversant la piste »,
dit le vélo à l’escargot.
« Vivre est dangereux », répondit l’autre.
9
Évier et lavabo constataient que sans eau,
ils n’étaient rien.
« Et pas grand-chose sans moi », dit le robinet
10
« Tu es bruyant et encombrant »,
dit le balai à l’aspirateur.
« Je suis moderne », répondit ce dernier.
11
La vie est courte maugréait le vieillard.
« Encore faut-il pouvoir naître »,
dit l’œuf dans son coquetier.
12
« Je suis ton âme »,
dit le papillon séducteur à la fleur.
« Une âme libertine », répondit la fleur.
13
La pluie et le soleil débattaient de leurs bienfaits
pour les êtres vivants.
« Oui, mais sans la terre, hein ?... », dit la terre.
14
Deux pieds philosophaient en marchant :
« Tous les chemins mènent quelque part...
– Pourquoi y aller ? », murmurèrent les souliers.
*
Avril 2020