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Patrick MIGNARD
Le « Conservatisme nouveau » est arrivé !
Article mis en ligne le 27 février 2007

Une forme de conservatisme déborde parfois de bonnes intentions.... C’est ce que l’on pourrait appeler un « conservatisme progressiste ». Certes, il y a de la contradiction dans les termes, mais à y regarder de près c’est bien de cela dont il s’agit.

En cette période d’incertitude et d’indétermination pour ce qui est de la stratégie politique à adopter, l’agitation qui tient lieu de mobilisation, voire d’analyse (?) embrume notre conscience et fini par nous faire prendre des vessies pour des lanternes (ou l’inverse).

BIS REPETITA PLACENT

« Les choses répétées, recommencées, plaisent »... surtout quand elles sont spectaculaires, clinquantes et donnent l’impression de la masse, de la force... C’est ce qui explique probablement la fringale insatiable, la frénésie militante pour ce genre de spectacle, de celles et ceux qui, à moindre frais de réflexion, se donnent le grand frisson politique.

La « démocratie », dans ce que l’on appelle pompeusement les « démocraties modernes » étant ce qu’elle est, un produit aseptisé, avec OGM (Opinion Gérée Médiatiquement), garantie sous vide et sans « conservateurs »,... la consommation peut se faire sans modération, sans risque d’indigestion et surtout sans risque pour le système dominant. L’emballage peut être très différent, le gadget-cadeau accompagnant le produit aussi, mais le « produit de base », lui, est le même pour tous... C’est ça l’égalité. Les gestionnaires l’on rêvé, les politiciens l’on fait.

Il faut dire que les metteurs en scène, et autres entremetteurs de spectacles, ne manquent pas. Les organisations politiques, peuplées, pas d’intermittents, mais de permanents, généralement bien payés, du spectacle politique, nous en donnent pour tous les goûts et font des prouesses pseudo artistiques pour attirer le chaland. Tous les styles y sont, même les plus ringards.

L’important n’est, paradoxalement, plus le résultat, dont, au fond de soi, quand on n’est pas borné, on sait très bien qu’il n’y en aura pas, ou si peu, mais de pratiquer une sorte d’hygiène politique qui aux yeux des autres (civisme) et de soi (narcissisme), permet de demeurer ce que l’on croit être, un citoyen... plutôt qu’un citoyen demeuré. Adeptes des« cellules d’aide psychologiques », s’abstenir !

Les vieilles recettes n’ayant pas fait leurs preuves, on les reprend tout de même à défaut d’en avoir d’autres, en remplacement. On a toutes les meilleures raisons du monde, de reproduire avec la plus grande sincérité, la main sur le cœur et l’esprit tranquille, les mêmes erreurs, et le cœur, à défaut du cerveau, n’y manque pas.

L’une de ces meilleures raisons est la fidélité.

Ah la fidélité ! Vertu cardinale. Elle est un peu la version civile de l’obéissance militaire. Cette fameuse fidélité, véritable éteignoir de la conscience et disons le, de l’intelligence, qui justifie toutes les erreurs, tous les sectarismes, toutes les dérives, parfois même tous les crimes. Les SS n’avait-ils pas pour devise : « Mon honneur c’est ma fidélité » (?) ?

On se trompe peut-être, mais attention,... par fidélité. L’erreur, alors, n’est pas qu’à moitié pardonnée, elle l’est entièrement.

La fidélité, posée en tant que valeur en elle-même, est extrêmement dangereuse si elle ne s’accompagne pas d’une ré interrogation permanente de sa finalité éthique et historique.

La fidélité, telle qu’elle est généralement pratiquée, à aussi cette « excellente » qualité, celle d’éviter de réfléchir à ce que l’on fait... On fait parce qu’« on » l’a toujours fait, que l’« on » nous l’a appris, que l’« on » nous l’a dit... « on » étant le chef, le parti, Dieu,... et puis, et surtout aujourd’hui que, si c’est dans les journaux et à la télé, c’est forcément vrai ! CQFD

La fidélité à des principes, ce qui est tout à fait honorable (encore faut-il savoir de quels principes il s’agit...), laisse rapidement, et souvent, la place à une fidélité au chef, au parti, à des habitudes qui deviennent des réflexes... transformant l’« homme libre » en un « fidèle » inconditionnel... Alors, la conscience, l’esprit critique, la lucidité, le recul nécessaire disparaissent ! Il n’y a plus innovation,, imagination, action,... seulement conservation, reproduction.

Ce que l’« on » nous dit de faire...Est-ce que ça sert encore à quelque chose ? Est-ce efficace ? Est-ce adapté ? Mais quelles questions hérétiques ! On vous en pose nous des questions ?

On fait parce que c’est comme cela que l’on fait et que on l’a toujours fait !

Et respectez SVP la tradition ! Si vous critiquez c’est que vous êtes des petits bourgeois repus qui n’ont rien compris et veulent donner des leçons !... CQFD(bis)

« Vouloir comprendre » est hérétique au regard des impératifs catégoriques de la « fidélité ».

Entre « fidélité » et « servilité » les marges de manœuvres sont parfois bien étroites.

Devant la tradition et la fidélité le citoyen se doit de passer chapeau bas et la tête religieusement inclinée en signe de soumission. Ainsi soit-il ! Direction les urnes !

LE CULTE DE L’INCANTATION

Ceints de l’écharpe de la fidélité, avec l’absolution des gardiens des valeurs (immuables et scrupuleusement respectées) de la République, fidèles aux traditions de la Révolution Française et des luttes sociales en France et dans le monde (qui ne sont évidemment pas en contradiction), avec respect à l’égard de ceux qui sont morts pour le « droit de vote » (si cher aux intérêts des politiciens de tous poils) et qui ont lutté pour nos acquis (qu’on est entrain de perdre par bêtise et lâcheté),... les vrais démocrates, dans un esprit de responsabilité (qu’ils sont bien sûr les seuls à avoir !) et pour éviter toute provocation et aventurisme (autrement dit risque de changement) demandent au peuple de jouer le jeu de la démocratie (?)... Ouf !

 Règle n°1 de ce jeu : Faire confiance aux politiques.

 Règle n°2 : voir règle n°1

Qui pourrait douter à la vue de certaines réunions publiques politiques que le/la Messie n’est pas revenu sur Terre ? Et même dans un souci de pluralisme, il n’y a pas un Messie, mais plusieurs. Des Messies à « géométrie variable » qui a chaque discours font des miracles,... le premier, de ces miracles, étant que leurs adeptes sont toujours d’accord, même quand ils disent des conneries et les prennent ouvertement pour des imbéciles. « Ensemble tout est possible ! » (?) ... « Demain on rase gratis !... ou presque ! »

Les meetings politiques ont remplacé les offices religieux, le décor est plus dépouillé... modernité oblige, mais le discours est tout aussi solennel. Seul problème, dans les deux cas, le fidèle est à jeun de voir le Paradis promis. Mais n’est ce pas finalement la foi qui est la plus importante ? Dans le cas de l’Eglise, une fois mort, le croyant ne lui demandera plus de compte... et pour cause. C’est plus compliqué dans le cas des politiques, une fois bien grugé le citoyen pourrait lui en vouloir de la tromperie, mais c’est sans compter sur l’habileté de ces filous qui ont toujours une bonne raison pour se défausser sur l’adversaire... Le deuxième miracle, c’est que ça marche à tous les coups...

LE « TOTALITARISME DEMOCRATIQUE »

Le champ politique est devenu un« champ clos » avec ses rites, ses principes, ses acteurs. Cet espace est borné par les lois, les habitudes, les certitudes, les médias. C’est un immense entonnoir au fond duquel le citoyen glisse inexorablement. Hors de cet espace, point de salut.

Les règles qui régissent cet espace laissent suffisamment de place aux discours pour qu’ils donnent l’impression de la liberté et surtout de la possibilité du changement... En fait tout y est organisé pour que tout changement soit impossible. L’entonnoir débouche sur une boîte de conserve.

Toutes les organisations politiques, mêmes les plus « révolutionnaires » ont largement contribué à, ce qui s’est révélé être, une extraordinaire mystification et se complaisent dans ce marigot.

On a réorganisé dans cet « espace » les places pour que tout le monde y ai sa place et ne puisse pas dire qu’il n’y est pas convié. Ainsi, même le plus contestataire, qui a accepté la règle du jeu, est totalement piégé sans même s’en rendre compte... Il suffit de voir comment agissent les organisations dites « révolutionnaires », contestataires et autres anti libérales et alter mondialistes... Elles ont même l’impression, si elles sont à l’extérieur, qu’elles sont exclues. Tout ce petit monde se presse au portillon et en redemande...

Le spectacle va commencer,... demandez le programme !

Les émissions politiques télévisées avec leurs chapelets de leaders politiques, disposés en rangs d’oignons, bien maquillés et parlant sagement à tour de rôle en sont l’expression la plus caricaturale. Il faut absolument y être. La vie n’existe pas en dehors.

Le système marchand, jamais à cours d’idées, a inventé un nouveau système : le totalitarisme démocratique.

La politique, la vraie, ce n’est pas comme la cuisine, ce n’est pas dans les vieux pots que l’on fait les meilleures soupes.

Parmi celles et ceux qui voudraient que « ça change », qui pourrait imaginer un seul instant que les farces électorales successives que nous allons ingurgiter vont « changer quelque chose » ?

Après la trêve des confiseurs, la trêve des politiciens. La gueule de bois va être de rigueur après toute cette agitation médiatico électorale.

Patrick MIGNARD


« Bon d’accord, et alors que faire ? » allez vous dire.


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