
Lee Miller (1907-1977) est une photographe américaine.
J’ai vu le film anglais Lee Miller, biographique, réalisé par Ellen Kuras.
Lee est interprétée par Kate Winslet.
Tout d’abord dire que la personnalité de Lee Miller et sa spécificité dans l’histoire de la photographie n’est pas bien rendu par ce film qui décrit surtout son rôle dans la Seconde Guerre mondiale et la découverte des camps de concentration, puisqu’elle a été la première photographe a témoigné de l’ouverture du camp de Dachau.
Pourtant Lee Miller, mannequin de mode pour la revue américaine Vogue, et venue à Paris en 1929, s’est formée comme photographe dans les bras du surréalisme de Man Ray, comme l’oubliée Bérénice Abbott.
Elle donc très bien connue avant la guerre Éluard et Nush, qui sont évoqués dans ce film, mais aussi Picasso, Cocteau, Max Ernst, Roland Penrose peintre surréaliste qui devient son mari.
Le film s’attarde plus sur Solange d’Ayen, interprété par Marion Cotillard, personnalité du Tout Paris d’avant-guerre, collaboratrice de Vogue qui fut internée par la Gestapo et dont le mari disparut à Bergen-Belsen. Mais le rôle de Solange est surtout d’évoquer la vie et les horreurs pendant l’occupation.
Toute cette période de la vie de Lee Miller, comme femme du monde et de la mode, intellectuelle et superficielle, est tout juste survolée, son enfance étant elle totalement absente.
L’action démarre réellement avec les bombardements sur Londres et la volonté de Lee Miller de couvrir les évènements comme reporter ce qui est lui interdit en tant que femme.
On voit donc surgir la revendication féministe d’égalité professionnelle. Pourquoi certains métiers comme ceux de photographe de guerre seraient-ils réservés aux hommes ? À cet égard la position machiste d’un Cecil Beaton photographe attitré des stars et de la famille royale est évidente. Elle va quand même y parvenir en tant qu’Américaine.

Et le film la montre traversant la guerre, le débarquement en Normandie, la libération de Paris, la neige de l’hiver 1944, accompagné par un autre photographe célèbre, David Scherman. Mais elle montre surtout, selon moi, un effarement de femme bourgeoise et superficielle devant les massacres et la souffrance.
Certaines de ces photos les plus connues sont reconstituées, mais sans que cela soit explicité. Et on en arrive à la scène de la baignoire d’Hitler qui est certainement sa photo la plus célèbre.
Dans ce film un peu froid, sans chair, sans émotion il y a quand même de très beaux moments et je voudrais en raconter un.

À l’ouverture du camp de concentration de Dachau, au milieu des monceaux de cadavres, elle entre dans une baraque et découvre un groupe de femmes déportées mangeant une miche de pain que l’armée américaine vient de déposer. Au milieu de ce groupe, une enfant effrayée dont elle essaie de s’approcher et qui la fuit. Et elle va alors la photographier, tout en la regardant. Or il faut se rappeler qu’avec son appareil 6x6 Rolleiflex la photographe ne regarde jamais directement son sujet qu’elle vise à travers un reflet. Cela la protège en plaçant ainsi comme une vitre, un écran, entre le monde réel et son cadre. En montrant à ce moment qu’elle abandonne cette protection pour regarder directement cet enfant martyr, Lee Miller devient beaucoup plus humaine, vivante, touchée.
Donc pour moi, en dehors de quelques instants forts, ce film n’a pas de vraie valeur. Il est beau, bien filmé, bien joué mais reste un biopic industriel un peu froid. On ne croit jamais à la réalité de ce personnage qu’on regarde, interprété par l’omniprésente Kate Winslet.
Son seul mérite c’est qu’il raconte ce qui doit être sans cesse répété surtout en ce moment de montée de l’extrême droite dans toute l’Europe, c’est là où nous mène le fascisme : à la haine de l’autre, au racisme, à la guerre, aux massacres.
Caillou