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Christiane Passevant
La nouvelle guerre médiatique israélienne
de Denis Sieffert (La Découverte)
Article mis en ligne le 15 septembre 2009
dernière modification le 9 novembre 2023

Le livre de Denis Sieffert est essentiel pour une approche des enjeux véritables dans cette région. Il mène ici un travail remarquable d’investigation, de décryptage et remonte aux sources de ce conflit colonial pour en établir les responsabilités. C’est à la fois une critique et une synthèse pédagogique des luttes, des contradictions et de l’effet de la propagande. La nouvelle guerre médiatique israélienne analyse, à partir de l’intervention de décembre et janvier derniers, le traitement de l’information, l’écartement des journalistes du terrain des événements, le contrôle de l’information par l’appareil médiatique israélien, les moyens et les réseaux mis en œuvre, l’instrumentalisation de la peur, la distorsion des images et des mots…

Dans La nouvelle guerre médiatique israélienne, Denis Sieffert aborde le rôle de la propagande, le contrôle des médias, la désinformation diffusée à l’intention des opinions publiques, leur instrumentalisation et, enfin, la déshumanisation d’une population.

En partant de la couverture médiatique de l’opération militaire israélienne « Plomb durci » contre la population de Gaza, il souligne l’effet du double langage existant dans les médias. Double langage qui d’ailleurs domine la communication israélienne depuis longtemps s’agissant de l’occupation de la Cisjordanie, de la Bande de Gaza et du plateau du Golan. Déjà, il n’est pas question dans les médias israéliens d’« occupation » ou de « territoires occupés » depuis la guerre des six jours de 1967, cela battrait en brèche le concept de l’État d’Israël constamment agressé et menacé. L’expression généralement employée est au mieux le « conflit israélo-palestinien », ou toute une gamme d’expressions, mettant en scène totalement fictive deux États ennemis supposant des moyens militaires comparables. Or les moyens militaires et le blocus n’existent que du côté israélien et non de la part de l’Autorité palestinienne.

À la question : « Qui sont les victimes et quels sont les agresseurs ? », les réponses apportées révèlent en général une méconnaissance ou une instrumentalisation pour qu’au final, l’on se perde dans les méandres d’amalgames et d’interprétations bien éloignées des faits.

Raisons stratégiques ? Méconnaissance ? Il est parfois difficile de démêler les motivations et les raisons de ce brouillage de pistes.

La propagande y tient un rôle central et y a acquis une dimension encore plus importante depuis l’attentat du 11 septembre 2001 à New York et le début de la « croisade antiterroriste » de Bush junior.

Tout au long de son ouvrage — La nouvelle guerre médiatique israélienne — Denis Sieffert s’efforce de revenir aux faits pour analyser une situation qui paraît inextricable, tant les enjeux sont brouillés. Par exemple, écrire que « Le Hamas est fondamentalement le produit de la dégénérescence d’un conflit colonial. » paraît évident, mais il n’en est guère question, comme de lire que « Le conflit israélo-palestinien trouve sa cause première dans la colonisation. » Et pourtant, la colonisation est bien ce contre quoi une partie de la population israélienne s’oppose.

Et même si les sondages ont annoncé une majorité de la population israélienne en faveur des bombardements sur Gaza, il n’en reste pas moins que des manifestations contre l’agression militaire israélienne à Gaza ont eu lieu dans les grandes villes israéliennes et que, depuis des années, de jeunes refuzniks, les femmes en noir, les Anarchistes contre le mur continuent de se mobiliser pour dénoncer la colonisation et ses conséquences désastreuses.

Mais peu d’informations filtrent sur cette opposition et leurs actions. Le cinéma israélien, cependant, montre les méfaits de la colonisation et de la militarisation, qui en découle, sur la société israélienne. La propagande a ses limites : la réelle menace contre Israël, « c’est une occupation qui se perpétue et qu’il ne suffit plus de cacher ou de justifier par une habile communication. »

Photos Gary Fields et Christiane Passevant