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Le crépuscule avant l’aube
Article mis en ligne le 27 février 2022
dernière modification le 31 juillet 2023

Le texte suivant est apparu aujourd’hui sous forme de podcast en russe sur le site d’Autonomous Action.

La guerre

Jeudi matin, Poutine a lancé la plus grande guerre en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale. Il se cache derrière les prétendus intérêts de la partie séparatiste du Donbas. Bien que la DPR et la LPR aient été absolument satisfaites de la reconnaissance de leur statut d’État, de l’entrée officielle de l’armée russe et des mille et demi milliards de roubles promis. Rappelons que depuis de nombreux mois, le coût des loyers et les prix des denrées alimentaires en Russie même augmentent de jour en jour.

Le Kremlin a posé des exigences absurdes aux autorités de Kiev - commençons par la "dénazification". Il est vrai que, grâce à leur participation active aux manifestations de Maidan en 2014, l’ultra-droite ukrainienne s’est assurée une position surdimensionnée dans la politique et les forces de l’ordre. Mais dans toutes les élections en Ukraine depuis 2014, ils n’ont pas remporté plus de quelques points de pourcentage des voix. Le président ukrainien est juif. Le problème de l’ultra-droite ukrainienne doit être résolu, mais il ne peut l’être avec des chars russes. Les autres accusations du Kremlin à l’encontre de l’Ukraine - corruption, manipulation des élections et tribunaux malhonnêtes - seraient bien plus appropriées pour le Kremlin, qui devrait les porter contre lui-même. Aujourd’hui, les troupes russes sont, au plein sens du terme, des occupants d’un pays étranger - même si cela contredit les attentes de tous ceux qui ont grandi avec des histoires de la Grande Guerre patriotique.

La Russie s’est retrouvée dans un isolement international. Le [président turc Recep Tayyip] Erdoğan, le [secrétaire général du Parti communiste chinois] Xi Jinping, et même les talibans demandent à Poutine de cesser les hostilités. L’Europe et les États-Unis imposent chaque jour de nouvelles sanctions à la Russie.

Au moment où nous préparons ce texte, le troisième jour de la guerre arrive. L’armée russe a une nette supériorité sur l’armée ukrainienne, mais la guerre ne semble pas se dérouler exactement selon le plan de Poutine. Apparemment, il comptait sur une victoire en un ou deux jours avec peu ou pas de résistance, mais de sérieux combats ont eu lieu sur tout le territoire de l’Ukraine.

Les Russes et le monde entier regardent maintenant des vidéos montrant des obus frappant des immeubles résidentiels, un véhicule blindé écrasant une personne âgée, des cadavres et des tirs.

Roskomnadzor [le service fédéral du gouvernement russe chargé de la supervision des communications, des technologies de l’information et des médias] tente toujours de menacer l’ensemble de l’Internet, en demandant : "N’appelez pas cela une guerre, mais une opération spéciale." Mais peu de gens les prennent désormais au sérieux. Tant que l’Internet en Russie ne sera pas complètement éteint, il y aura suffisamment de sources d’information. Au cas où, une fois de plus, nous recommandons de configurer à l’avance Tor avec des ponts, VPN et Psiphon.

Les effets des sanctions et de la guerre commencent tout juste à être ressentis par les Russes : La plupart des distributeurs automatiques de billets de Moscou n’avaient plus de monnaie papier vendredi. Pourquoi ? Parce que la veille, les gens ont retiré 111 milliards de roubles des banques : en fait, toutes leurs économies. Le marché de l’immobilier s’est effondré, et la construction de bâtiments résidentiels est la branche la plus importante de l’économie russe. L’industrie automobile étrangère cesse progressivement d’expédier des voitures en Russie. Les taux de change du dollar et de l’euro sont artificiellement contraints par la Banque centrale. Les actions de toutes les entreprises russes ont sévèrement chuté. Tout le monde comprend que la situation ne peut qu’empirer.