Alain Rustenholz évoque un bouge célèbre de Montmartre dans ce passage de Paris Ouvrier :
« Vin et lapin (sauté) sont les deux mamelles de la barrière ; le vin, parce qu’ici, outre octroi, il est détaxé ; le lapin parce qu’on est déjà comme à la campagne. Le signe de croix du pochard se ponctue d’un triple « lapin
sauté ! » tandis que quelques enseignes sont restées célèbres : le Lapin vengeur à la barrière de Belleville, ou le Lapin agile, du vieux Frédé, à Montmartre, que fréquentera encore Victor Serge.
Aux barrières ont lieu les bagarres entre bandes rivales, les bals et les rassemblements revendicatifs ou politiques. Le vin y échappe à l’impôt, le corps à l’organisation du travail, l’expression à la répression policière.
Mais la ville grignote sans cesse sa frontière et le bourgeois (au sens de citoyen-citadin) rattrape l’ouvrier. La barrière verte devient ceinture rouge avant que les ondes hertziennes de la télévision ne mettent fin à la course en abolissant la distance sociale pour ne plus laisser que des consommateurs. »