24 mars 2011
Un citoyen républicain, c’est quelqu’un debout, dans l’isoloir et qui fixe son regard le plus fort qu’il peut, sur un bulletin de vote – cette image, si nous la regardons un moment, nous aidera peut-être à ne pas nous égarer. Un citoyen électeur debout devant quelques noms imprimés et qui essaye de comprendre ce qu’on lui propose. Quel est son objet, son but, son modèle ? Rien d’aussi insaisissable que le modèle d’un citoyen électeur ; ce n’est pas un vase de fleurs, une figure nue, un plat de pommes de terre. Même une élection la plus simple a trait à plus d’une personne, à plus d’un instant. Les personnages qu’il fixe sont sans grâces et la conscience flétrie, ils disent s’occuper de son avenir, de sa sécurité, de son confort, mais ils sont loin, ils sont proches, ils sont insaisissables, jamais où il voudrait qu’ils soient, ils vont vieillir, ils cheminent de ville en ville, de lieu en lieu, d’écran en écran, la lumière devient verte puis noire parcourue d’éclairs blancs et l’écran persiste, vidé de sens. Seul, l’électeur doit fixer son regard sur un modèle qui bouge, qui change, qui disparaît puis reparaît toujours diffèrent, toujours identique, le regard braqué sur une image qui n’est pas un objet unique mais d’innombrables objets qui bougent et dansent en mélangeant les sons et les couleurs, les maux et les besoins. Deux mots seulement recouvrent tout ce que regarde l’électeur à ce moment-là : une vie désertée.
Et maintenant regardons l’électeur citoyen, avec une attention intriguée vers l’électeur de gauche ou de la gauche dite (pourquoi ?) extrême. Que voyons-nous ? Simplement quelqu’un debout dans l’isoloir ? Cela nous dit peu de chose, ou rien. Et nous n’en savons pas plus. Quand on songe que nous parlons autant des électeurs et des citoyens actuellement qu’ils parlent d’eux-mêmes, c’est curieux comme nous savons peu de choses sur eux. Pourquoi sont-ils à un certain moment si nombreux, et après si rares ? Pourquoi à certains moments sont-ils capables d’aller au-delà du bulletin de vote et après rien que de la broutille ? Il n’y a pas de réponse naturellement. Puisque nous n’avons pas encore découvert le virus de la révolution, nous en savons encore moins sur leurs volontés que sur leurs frustrations. Nous avons moins de preuves. Nous n’avons pour le moment que des théories sur les élections, sur les électeurs, sur la singularité des électeurs de gauche, sur la liberté, beaucoup de théories sur les citoyens, et sur des projets de société mais toutes différentes entre elles. Le sociologue dira que le citoyen est le produit de la société dans laquelle il vit, le poète que l’électeur est une apparition céleste qui descend de là-haut, incarne la démocratie et s’évanouit, le postmoderne affirmera que droite ou gauche, il faut voter. Pour le psychologue, un électeur est une huître : nourrissez-le du gravier des faits, irritez-le avec la laideur ordinaire et par compensation, il produira régulièrement comme une perle rare, un bulletin de vote. Les généalogistes disent que certaines souches, certaines familles produisent des électeurs comme les figuiers les figues, avec obstination. Cela prouve que nous n’y voyons goutte au sujet des électeurs ; n’importe qui peut faire une théorie ; le germe de la théorie c’est presque toujours le désir de prouver ce que le théoricien désire croire.
Les théories sont donc des choses dangereuses. Néanmoins il nous faut en risquer une puisque nous discutons de l’électorat français et singulièrement des circonstances de ses vertus républicaines, de sa croyance en une démocratie flinguée de tous côtés qui ne sert plus aucun intérêt démocratique.
Dés que nous parlons de ses tendances ou des pressions sociales qui les pourchassent et les fondent, nous croyons implicitement qu’il existe quelques forces politiques, quelques influences, quelques conditionnements, quelques pressions extérieures assez fortes pour agir sur tout un groupe d’électeur, de telle sorte que les pensées de tous ont une certaine ressemblance, broutant tête baissée, avançant droit vers le gouffre. Il nous faut alors une théorie sur la nature de cette influence. Mais ne l’oublions jamais - les influences sont en nombre infini, les électeurs sont d’une sensibilité infinie, chaque électeur a sa sensibilité propre. C’est pour cela que les opinions de l’électeur de gauche, dont l’obstination nous étonne car il n’y a plus depuis belle lurette de gauche, changent sans cesse, comme le temps, comme les nuages, flirtant avec le racisme, l’exclusion, la répression, l’ordre et la morale, toutes idées bien de gauche. Il y a des groupes politiques en France, c’est un fait. Leurs électeurs descendent d’autres électeurs comme les familles des familles. Ils ressemblent à leurs parents comme les petits des hommes ressemblent à leurs parents, cependant ils diffèrent entre eux comme les enfants diffèrent entre eux ; et parfois ils se révoltent contre cette nature d’enfant en pleurant, en gémissant comme les enfants se révoltent lorsqu’ils sont frustrés ou que leur couche est souillée. Alors ils votent blanc ou nul. Cet acte n’empêche ni la frustration, ni la répugnance de la couche, il se substitue à la caresse rassurante de la maman pressée, il console jusqu’à la prochaine fois où il faudra bien voter utile car tout aura encore une fois empiré. Le système démocratique est une prison qui se construit, qui se referme sur eux, qui leur demande abnégation, soumission mais dont bientôt tous les occupants voudront s’évader sauf les électeurs de gauche.
Peut-être sera t-il plus facile de comprendre les électeurs du pacte républicain de cette année en prenant un rapide aperçu de leur dernière bataille. En 2009, les Français étaient au cœur d’une guerre sociale comme ils le sont toujours aujourd’hui. Et il est naturel de se demander comment la guerre sociale les affectait. Est-là une des influences qui les amenèrent à voter ? La réponse est très étrange. Leur lutte n’affecta pas du tout la participation des électeurs et particulièrement la constante tendance des électeurs de gauche à oublier ce qui les caractérise, leurs attentes, leurs volontés de changements, sur le terrain social. On peut en trouver la preuve dans l’œuvre politique des gouvernements socialistes élus par leurs soins, des ministres issus de leur rang, affirmant les représenter comme ceux-ci le proclament, tout en servant les intérêts du libéralisme avant tout. Parce que les gouvernements vivent très peu de leur temps, aucun de leurs programmes ou lois et décrets ne mentionnent cette guerre sociale qu’ils croient contenir en ne la citant jamais. C’est donc que leur modèle initial – leur vision de la vie humaine – n’est ni troublé ni agité ni changé par la guerre qui se déroule pourtant devant eux et contre eux. Et eux-mêmes ne sont plus capables de reconnaître et de nommer les conflits et les enjeux réels de cette guerre quotidienne alors que la réalité brutale du fascisme ordinaire contamine jusqu’à leurs rangs et leurs pensées sans se dissimuler, en toute tranquillité, et cela grâce à leur absence de jugement mais aussi à leur volonté de séparer les individus jusqu’à l’infini dans l’illusion démocratique. Il y eût Chirac/Le Pen, maintenant les cantonales comme signaux d’alarme répétés. Le réveil, bien entendu, est rude.
Il est facile de voir pourquoi.
Les guerres de ce temps paraissent lointaines, elles sont faîtes par les soldats qu’on voit à peine, par avion, par missiles, par images et médiatisés par un écran sur le même plan de compréhension que les séries télévisées. Elles ne sont pas vécues par le simple citoyen à qui par ailleurs on ne demande rien sinon de regarder l’écran en mangeant sa soupe froide. La rumeur des batailles met longtemps à atteindre le citoyen. C’est seulement quand le tintamarre de la malle-poste ornée de lauriers retentit sur les routes de la communication qu’il apprend qu’une victoire a été remportée par d’autres que lui et qu’ailleurs on allume des chandelles qu’on colle aux fenêtres. Cette immunité dure depuis longtemps. Bien entendu, la France est parfois en guerre : hier l’Irak et la Yougoslavie, l’Afghanistan depuis un certain temps et surprise du jour la Lybie. On s’habitue au nom de valeurs républicaines désertées de logique, on se bat à heures fixes sur l’écran de la télévision et le citoyen, l’électeur de gauche, ne s’est pas posé de questions. La conspiration contre son monde démocratique éblouit le citoyen de gauche comme d’extrême gauche, il se tait et bouffe la soupe qu’on lui sert avec une certaine tranquillité. La guerre est un hochet servile. La catastrophe est toujours ailleurs, elle tue toujours les autres, jamais lui, bien protégé de la dangerosité du monde grâce aux vertus républicaines qui le rendent civique avec une constance sans pareille. La guerre est un spectacle que l’on décrit dans son exactitude longtemps après qu’elle a eu lieu, sur le moment elle est décrite comme une illustration, une scène, un fantasme, un film, les blessés et les morts sont alignés sur le sol, dans les hôpitaux, le sang coule, il est rouge comme celui des acteurs qui tombent et meurent dans les films interchangeables. La bataille dont on parle alors ne transforme pas la vie de ses personnages, elle en tue, elle en ampute seulement quelques-uns.
Nous pouvons donc dire qu’en général, la guerre sociale, la vraie guerre, n’affecte ni le citoyen ni sa vision de la vie humaine parce que les gouvernements qui se sont succédés grâce à lui ont aplani cette guerre dans l’image d’une paix sociale qu’ils justifient par des guerres exotiques et lointaines qui leur permettent de gouverner en durant. Alors la guerre sociale…devient exactement l’inverse : une paix sociale qui règne dans les cœurs et dans les foyers portée par les effrois polis des électeurs de gauche, bien droits dans leurs bottes républicaines, dans leurs illusions démocratiques.
Voyons l’influence de cette paix hexagonale au quotidien. Rassemblons quelques faits avant de nous lancer dans les délices et les dangers de la théorie.
Pour le citoyen, pour l’électeur de gauche devenu aujourd’hui si unitairement républicain - mais la république a changé de sens, elle a perdu peu à peu toutes les valeurs substantielles qui la sous-tendait au départ pour devenir une vague esthétique de la démocratie sans cesse rognée par le pouvoir - la vie doit avoir l’aspect d’un paysage découpé en champs séparés. Dans chaque champ, un certain nombre de gens. Chaque groupe a dans une certaine mesure ses traditions, ses mœurs, son langage, son costume, ses occupations propres. Mais chaque groupe, dans la paix sociale, se trouve entravé, stationnaire – des troupeaux paissant chacun entre ses haies. Et le citoyen moderne, de gauche et républicain, ne cherche pas à supprimer ces séparations, il les accepte. Il les accepte si totalement qu’il n’en a plus conscience. Cela peut-il servir à expliquer pourquoi ces citoyens tout à leur fierté d’avoir sauvé la démocratie en votant Chirac par un pacte républicain glorifié qui ne leur profita guère, sont capables de se contenter depuis longtemps de tant de rôles sociaux qui ne sont que l’expression régressive d’une humanité tenue en l’état d’un peuple colonisé ? Est-ce parce qu’ils ne voient pas les haies qui séparent les classes, qui les séparent entre eux ? Qu’ils voient seulement des étrangers qui vivent entre les haies ? Est-ce pour cela qu’ils stationnent à la surface des choses, au milieu des images déformées d’eux-mêmes et du monde, qu’ils survivent inchangés et constamment dépendant du rythme électoral et de la politique imposés mais jamais de la vie, jamais de leurs besoins véritables ? Pour nous aujourd’hui, pour ceux qui veulent, les haies sont visibles. Aujourd’hui nous pouvons voir que chacun des hommes politiques, de gauche ou de droite, n’a affaire par la politique qu’à une très petite portion de la vie humaine et que tout le reste est interprété pour contrôler cette petite portion de vie qui persiste à s’affirmer. Nous pouvons voir cela maintenant ; mais l’électeur citoyen lui-même n’a pas conscience qu’il n’a affaire qu’à un seul type d’homme politique dans ces élections, au modèle unique formé par une idéologie qui l’impose comme l’unique choix possible, dans une absence de perspective humaine véritable, par laquelle lui-même est morcelé, où il perd liberté et esprit critique. L’homme politique sait qu’il est issu d’une idéologie, il est né pour cela, il lui doit tout et c’est ce qu’il connaît le mieux. L’inconscience du citoyen électeur est pour lui un énorme avantage.
Pour l’électeur de gauche ou d’extrême gauche raidi dans la pose républicaine, pour l’électeur démocrate invoquant les droits de l’homme et Jaurès sans bien comprendre, retrouvant aujourd’hui la pose antifasciste, ce qui n’a pas d’importance politique sombre dans l’oubli. C’est lorsqu’il tient dans la main son bulletin de vote que ses chances de participer à la vie sociale sont les plus fortes. Il faut qu’il vote car l’histoire, pour lui, est immédiate, un sursaut entre deux nuits sans rêves. Dés le lendemain du vote, il glisse dans l’inconscient, dans cette ferme prise en charge qu’il a appelé de ses vœux, de son vote, il s’abîme dans l’écran de sa télévision, et dans la lecture de ses journaux qui lui montrent le chemin, auxquels il a délégué son esprit critique. Il est converti, la cérémonie du vote constitue, à sa manière, un rituel destiné à ressourcer, à chaque changement de règne, la même continuité, la même protection de la politique, dans l’adoubement d’un homme ou d’un parti, en fonction d’un contrat symbolique aussitôt caduque. Pour être efficace, le vote doit être une cérémonie profondément conservatrice, dont l’archaïsme garantit la validité. Les innovations ne peuvent qu’y être rares et renforcer le rite républicain en le poussant plus loin dans le même sens répressif. En fait, tout devient brouillé, confus pour l’électeur, il cherche la vertu dans la paix, la justice dans la sécurité, le sacré dans la république mais il ne trouve que pénitence, mesures coercitives, observance religieuse du dogme politique pour lequel il a voté, au fond de lui il ne vote pas pour un parti, il maintient l’artifice d’une réalité sociale basée sur son exploitation, sa misère, ses peurs, qu’elles soient fondées ou non. Fausses décisions, faux lieux, faux espaces. Non-lieux, non-espaces, décisions nulles. La communauté humaine s’achemine vers une forme de contrôle la réduisant à un pur être animal, en fonction des techniques de communication, des manipulations de l’inconscient. Là où des sursauts de désaveu du système secouent par instants le procès d’une identification forcée, que va faire le citoyen ? Va t-il changer d’avis ? Va t-il se lever pour exprimer bien haut sa colère et son désarroi lorsque le contrat (même symbolique) n’est pas observé par l’autre signataire ? Non, car il doit voter bientôt sur ce sujet ! Il lui faut attendre les nouvelles élections pour que les paysages s’éclaircissent et que des formes plus précises à ses yeux se dessinent à nouveau. Après cet entre-deux, une autre élection arrive annoncée à grands fracas, le voile se lève ; et voilà la chose magnifique qui avance, la chose qu’il veut vivre, qu’il doit vivre, parce l’isoloir et le bulletin de vote simplifient les enjeux, compose avec une noblesse parfaite de l’avenir identique des gens dans l’isoloir. Un jour, dira-t-on que l’électeur que l’on voit mécaniquement voter était déjà mort, qu’il était sans vie ? Lui, il affirme que des gens sont morts vraiment pour qu’il puisse voter mais il oublie qu’il s’agit d’autres temps, d’autres lieux. Son vote mou, soumis, est précisément une injure pour cette mémoire insurrectionnelle qu’il ne comprend pas. Elle ne peut justifier l’aveuglement et l’aliénation consentie.
Pourtant, regardons encore, dans cette chose qui progresse droit vers lui, se structurent des fragments de mémoire et d’histoire à peine coupés, recollés, des nécessités morales et la menace d’une justice divine, toutes choses qui lui sont dictées et qu’il se sait incapable de prolonger ou d’atteindre par l’urne dérisoire mais qui constituent l’ultime aboutissement de son engagement momentané : il vote, il sort de l’isoloir la tête droite, l’esprit un peu honteux de cacher comme une maladie honteuse, un engagement aussi magnifique, aussi définitif, aussi glorieux, aussi romantique.
L’émotion dans la tranquillité se renouvelle, elle parodie une république individualisée, elle réécrit une histoire subversive oubliée, désincarnée maintenant dans le vote, par un rite nivellateur déjà combattu en son temps par les révolutionnaires de cette époque. Si nous en concluons que par tranquillité, nous entendons la passivité nécessaire au citoyen électeur afin de continuer à voter quelque que soient les situations, alors la tranquillité et le confort en chaussons sont devenus une vertu républicaine de plus pour le brave citoyen de gauche.
Si donc nous pouvons hasarder une théorie, nous pouvons dire que la paix et l’idée de la prospérité sont des influences qui donnent aux citoyens électeurs un air de famille partagé à droite comme à gauche. Ils ont des loisirs, ils ont la sécurité, la vie ne risque pas de changer, eux-mêmes ne risquent pas de changer. Ils peuvent regarder la télévision puis cesser de regarder la télévision. Ils peuvent crier de joie lorsque leur équipe sportive gagne, ils peuvent pleurer si elle perd. Ils peuvent oublier et puis dans leurs lits douillets se souvenir. Ce sont donc là quelques-unes des conditions qui, malgré de grandes différences individuelles, leur ont donné cet air de famille prospère, cet air civilisé de fonctionnaires de colonies.
Le XXe s’est achevé mais les mêmes conditions de guerre sociale durent toujours.
Le citoyen électeur de gauche regarde passivement sa vie et la vie dans le monde, il vote régulièrement ; municipales, cantonales, régionales, nationales, rien ne l’effraie, rien le remue dans ce geste et il a raison de ne pas s’effrayer ni de remuer ses fesses, le monde et sa vie dans ce monde sont liés par contrat, lui comme tous les autres ont des chances égales de développer leurs dons. Mais il faut accepter les coups du sort, accepter les gratifications et les illusions. Il y a parfois des crises plus fortes que d’autres, il faut alors renouveler le pacte républicain sans voir que c’est précisément lui qui est à l’origine de ces crises. Pire, les conditions de vie du citoyen-électeur se dégradent ! La vie humaine est encore divisée en classes ; il tente d’apercevoir la classe d’où lui-même est issu ; les classes sont encore si bien établies qu’il a presque oublié qu’il y a encore des classes ; et il est encore si sûr de sa situation qu’il est presque inconscient de sa condition et de sa quiétude. Il croit qu’il regarde la vie toute entière et qu’il la regardera toujours ainsi. Ce n’est pas là une image de pure fantaisie. Tous ces citoyens de gauche vivent sans rien faire d’autre que voter en pensant changer la société pour que rien ne change. Il leur arrive de décrire leur jeunesse, quand ils commençaient à penser et non à oublier. On leur demande : « Comment avez-vous appris à voter ? » Ils disent : à l’université, certains à l’école, d’autres à l’église, beaucoup : je l’ai vu à la télévision, en lisant, en écoutant, en parlant, on nous l’a dit, ça s’est toujours fait, certains sont morts pour ça, mes parents me l’ont dit. Certains ne savent pas : à eux on n’a rien dit et ils n’ont pas eu la curiosité de chercher.
Ils leur semblent qu’ils vont continuer à vivre comme cela, qu’ils déterminent efficacement leur vie (de manière à ne jamais la changer), ils votent dans une tranquillité prolongée, par ce geste ils réalisent entièrement toutes leurs préoccupations sociales à intervalles mathématiques, dans un temps saucissonné par les élections, ils sont partis pour voter comme cela, éternellement. Puis, soudain, comme une crevasse dans une route lisse, la guerre sociale survient. Elle était derrière la porte, elle attendait sur le paillasson, maintenant elle griffe les meubles, elle pisse sur la moquette, elle arrache le papier peint du salon, il faut la mettre dehors, l’expulser, il faut que le carré de choux redevienne un cocon confortable avec sa télévision en embuscade dans chaque recoin, il faut que l’on puisse être tranquille en pensant au temps qu’il fera demain et parfois après demain.
Mais avant de poursuivre avec l’histoire de ce qui se passe avec ces dernières élections, regardons un moment de plus près non pas le citoyen de gauche revendiquant un électoralisme intransigeant, non pas son probable modèle politique de renoncement, mais son possible rôle social. Le rôle est une partie très importante de l’équipement du citoyen, à gauche et à l’extrême gauche. C’est l’idée de ce rôle qui lui donne l’attitude qu’il prend vis à vis de son modèle politique de gauche ou d’extrême gauche, qui décide de ce qu’il croit voir de la vie humaine, qui influence profondément son pouvoir de communiquer ce qu’il voit et ce qu’il comprend. Par son rôle, nous entendons l’apparence d’un rapport à l’histoire non la construction délibérée et consciente de sa propre histoire. C’est un fait, le rôle est un fait. Pas une théorie car tous les citoyens, depuis Bourdieu jusqu’à nos jours, avec si peu d’exceptions qu’on peut les compter sur les doigts d’une main, se sont élevés vers un même genre de rôle : un siège surélevé. Tous les citoyens, et particulièrement les électeurs de gauche, sont tous tendus vers ce leurre. Tous, ils se veulent élevés de la masse sur une tour de stuc et les militants sur une tour d’or d’où ils pourront distribuer leur éducation positive.
Ne nous faut-il pas conclure, si grandes que soient les différences entre eux tous et bien que nous ayons avoué que nous savons peu de choses sur la nature des influences, qu’il doit y avoir un rapport sur la nature des influences, qu’il doit y avoir un rapport entre le rôle et la fidélité au rite du vote ? Ce ne peut être par pur hasard que ces petits rôles de gauche et d’extrême gauche si éloignés de la vraie vie produisent les mêmes effets partout où ils votent. C’est pourtant un fait. Dans l’image de ce rôle, dans la manière de communiquer celui-ci, l’idéologie de gauche, les idéologies d’extrême gauche, l’idéologie tout court, diffusent l’absence. Le vote et ce qui concoure au vote est en quelque sorte un anéantissement social préventif. Pour l’État de droit culminant au-dessus de toutes ses lois, pour le système, pour l’idéologie, faire voter, c’est vaincre.
La chose est si évidente qu’il est étonnant qu’on ait tenu si peu compte de l’idéologie ces dernières années, gauche et droite confondue en elle. C’est peut-être parce que l’éducation du citoyen est si peu définie par rapport aux nombreux domaines de la vie. Vivre, aimer, parler, rencontrer, être disponible, avoir confiance, bien des choses différentes, semble t-il s’y trouve oubliées. Pour élever un citoyen, il faut l’enfermer dans une école, puis dans un bureau, dans un travail, dans un espace temps réduit, l’isoler, lui apprendre trois lieux communs peut-être quatre, et lui donner l’illusion de partager le monde à travers un écran de télévision. Il faut que le système lui apprenne à se contenter de survivre avec très peu de moyens, et c’est là que la chose se passe. Il faut qu’il apprenne à se mutiler. Je le répète qu’y a t-il d’étrange ? Personne ne trouve étrange que vous disiez qu’un patron doit apprendre à voler ou qu’un policier doive tuer. Il est alors normal d’affirmer qu’un électeur s’estropie à chaque tour d’isoloir. Il en est de même pour le citoyen avec une nuance de plus. Car l’art de se rabaisser est au moins aussi difficile que les autres arts. Les gens ne tiennent pas compte de ce genre d’éducation peut-être parce qu’il est mal défini, mais vous verrez en regardant de plus prés, que presque tous les citoyens électeurs qui ont pratiqué l’humiliation avec succès en votant Chirac, l’avaient appris comme le reste : en ne vivant pas. Ils étaient au sommet d’une tour. C’est une tour d’une importance extrême ; elle décide de l’angle de vision du citoyen, elle affecte son pouvoir de vivre selon des inclinations naturelles, elle affecte son pouvoir de communiquer, elle affecte son pouvoir d’aimer.
Dernièrement, la tour était une tour bien stable. Le citoyen de gauche était à peine conscient de sa tranquillité idéale ou des bornes de sa vision. Beaucoup avaient de la sympathie pour le gouvernement, d’autres avaient de plus une grande compréhension pour le racisme, la sécurité, la police, les guerres lointaines, ce qui facilitait leur bonheur, car rien ne devait ébranler leur confort. Ils voulaient continuer à jouir de leurs avantages. Ils ne désiraient pas détruire la tour, ni en descendre. Plutôt la conserver telle quelle. Et la vie humaine ne changeait pas, la société restait la même depuis si longtemps qu’il devenait inconvenant de parler de lutte des classes, ou même de penser simplement à la révolte. En outre, la tour elle-même avait tenu bon sous les pieds du citoyen de gauche, avec le support de la politique socialiste, des partis de gauche, de leurs idées apparentes, de leur histoire héritée. La tête blottie dans les nuages de l’idéologie, durant toutes ces années importantes, le citoyen de gauche, quand il votait à gauche, pensait respectueusement à la république de gauche quand il recevait toutes ses influences et ses enseignements simplifiés qu’on résume sous le mot de conditionnement. Telles furent les conditions qui marquèrent profondément la volonté des électeurs de gauche et de l’extrême gauche de ne rien entendre, de ne rien voir, de ne rien comprendre. Car lorsque survint une explosion de la guerre sociale au soir du premier tour avec l’alternative (modeste) Chirac/Le Pen, tous ces électeurs citoyens qui se donnent comme représentatifs du modernisme de leur temps, avaient leur passé, leur conditionnement, en sécurité derrière eux, en sécurité en eux ; ils gardaient le souvenir d’une vie paisible, d’une civilisation stable que les cantonales viennent malheureusement bousculer en rappelant de mauvais souvenirs. Alors même que la guerre avait fait irruption dans leur vie depuis longtemps et emporté certains d’entre eux vers les rives du fascisme ou de la droite au pouvoir, ils votèrent, ils ne pouvaient que voter et ils votent encore comme si la tour tenait bon sous leurs pieds. En un mot, ce sont les héritiers inconscients d’une longue tradition de silence.
Au soir du premier tour des élections, les jeunes sont apparus comme leurs parents, les habitants de la tour. Mais quelle différence dans la tour elle-même, dans ce qu’ils perçoivent avec la spontanéité de la jeunesse du haut de la tour ! Quand ils regardent la vie humaine, que voient-ils ? Partout la guerre, le terrorisme, les guerres de religion, la guerre pour la terre, la guerre pour le pétrole, la guerre du plus fort, la guerre économique et des convois d’ injustices mais aussi quelque part, l’exigence toujours présente du changement qui affecte ouvertement la totalité de la vie. Un peu partout les vieilles haies changent de place, on jette les vieilles tours par terre. Mais on plante aussi d’autres haies, on élève aussi d’autres tours. Toute la civilisation, toute la société change. En France, les tours ne sont plus stables, ce sont des tours penchées. On vote pourtant en dépit de la réalité du changement qui se fait partout, sous la menace de la guerre, sans s’en rendre compte. C’est peut-être pour cela que le civisme a réapparu comme une théorie de gauche et d’extrême gauche ; que les lycéens, les étudiants, confondent pétainistes et anarchistes, collabos et révolutionnaires, qu’ils ne voient pas que leurs parents ont plus collaboré avec les derniers gouvernements successifs par leur immense passivité que les libertaires et les révolutionnaires qui sont en état de confrontation permanente avec le pouvoir. Les lycéens, les étudiants se sentent obligés de prêcher avec des mots qui ne leur appartiennent pas, qu’ils comprennent à moitié, afin de justifier leurs parents, les compromissions de ceux-ci et peut-être ces slogans bâtards annoncent-ils pour demain leur soutien au fascisme afin de détruire ces libertaires et ces révolutionnaires si nuisibles, si remuants, qui sait ? On s’explique le caractère vide de leurs slogans altermondialistes parce qu’on sait qu’ils n’ont aucune expérience personnelle d’une société sans tour et sans classe, que le projet d’une société sans classe ne leur est même pas envisageable et surtout qu’ils n’ont aucune idée de la guerre et des luttes qui les entoure alors que les collabos (les vrais) et les indicateurs de police prennent déjà tranquillement leurs places parmi eux sans qu’ils sans doutent. Une influence unique s’exerce sur tous et les induits à voter et à faire voter et à dire n’importe quoi, comme ces ineptes "zones autonomes temporaires" qui ne protègent personne. Et cette influence, ne l’oublions pas, peut fort bien exclure d’autres femmes, d’autres hommes attirés par l’espérance d’une vie authentique, vraie, et que le spectacle de la postérité politique ne tente pas, qui refusent de se mettre à l’unisson des chefs de file comme suivants, de l’idéologie comme prison, parce que cette influence est hostile à la vie humaine et qu’ils ne peuvent pas vivre pleinement tant qu’ils sont soumis à ces forces.
Mais la tendance qui nous permet de regrouper maintenant tous les électeurs comme citoyens, de la gauche à la droite, des parents à leurs enfants, et qui donne à leurs gestes de voter une signification commune, c’est la tendance qu’à leur Tour – la tour meublée de tranquillité, de rituel, de religiosité républicaine, de communauté fictive – à pencher.
Pour mieux les comprendre, imaginons que nous sommes réellement dans une tour penchée, et notons nos sensations. Voyons si elles correspondent aux traits que nous observons dans leur renoncement par leur adhésion au rituel du vote. Dés que nous sentons qu’une tour penche, nous prenons très vivement conscience que nous sommes dans une tour. Tous les citoyens électeurs sont eux aussi très vivement conscients qu’ils sont dans une tour, conscients de leurs rôles que leur confèrent celle-ci, de leur place et de leur confort moral. Et quand nous arrivons au sommet de la tour, comme la vue nous paraît étrange ! Pas complètement sens dessus dessous mais de biais, oblique. C’est caractéristique aussi des citoyens électeurs de la tour penchée ; ils ne regardent rien bien en face ; ils regardent ou par-dessus, ou par-dessous, ou de côté. Il n’y aucun citoyen qui puisse faire face à la réalité en tant que citoyen. C’est peut-être pour cela que la tour leur paraît si haute. Que sentons-nous ensuite, élevés en imagination au sommet de la tour ? D’abord du malaise ; puis de la pitié pour nous-mêmes à cause de ce malaise ; et cette pitié devient bientôt de la colère – de la colère contre le constructeur, contre la société qui est responsable de ce malaise. Il semble que ce soit aussi les sentiments des citoyens de la tour penchée. Malaise, pitié pour eux-mêmes, colère contre la société. Et pourtant (voici leur véritable tendance), comment détruire ou transformer radicalement une société qui après tout vous donne une très belle vue et une impression de sécurité et de confort ? Vous ne pouvez pas changer le cœur de cette société tout en continuant à en profiter. Alors, tout naturellement, vous choisissez une personne (un révolutionnaire fera l’affaire), une situation particulière (une période de bouleversement social intense) comme bouc émissaire ; et vous espérez ainsi éviter d’être fustigé vous-même, d’être considéré comme responsable. Le cri du bouc émissaire retentit dans les couloirs – s’il vous plaît, Monsieur, c’est lui, pas moi – ce sont là des tendances très naturelles et si nous étions à leur place nous inclinerions peut-être à faire de même. Mais nous ne sommes pas à leur place ; nous n’avons fait que grimper en haut d’une tour imaginaire. Nous pouvons cesser d’imaginer. Nous pouvons descendre.
Mais les citoyens, les électeurs de gauche ne peuvent pas. Ils ne peuvent pas rejeter leur rôle, leur conditionnement. Et puis, à leur crédit mais pour leur confusion, la tour penchée non seulement penchait mais parfois elle penchait de plus en plus à gauche, puis par magie à droite tout en se réclamant de gauche.
Il fut un temps où certains habitants de la tour, plus curieux, d’esprits plus libres que d’autres, lurent autre chose que les faits divers, regardèrent autre chose que les sports et les journaux télévisés. Ils lurent Marx, Bakounine ou Debord. Ils devinrent révolutionnaires ; ils furent en permanence ennemis du fascisme et de l’UMP, du PS et du MODEM, des Verts et du NPA. Ils se rendirent compte que la tour était fondée sur l’injustice et la tyrannie. Ils tentèrent de détruire la tour. Parfois ils y arrivèrent avant que d’autres tours ne furent prestement construites, plus spacieuses, plus vastes avec de plus larges fenêtres. Leur manque d’unité ou leur isolement expliquent les contrastes violents, l’obscurité de leur stratégie, leurs échecs. Ils étaient pris au piège, eux aussi, c’est en les regardant, en les voyant vivre à travers leurs expériences que nous comprenons mieux bien des choses qui dans leurs échecs nous laissent perplexes. Ces habitants sont honorables, nous les remercions de nous avoir montrés comment pulvériser la première pierre, comment raser les tours et leur savoir-faire nous est précieux.
Revenons à nos habitants moins glorieux, frileux, soumis.
Il existe au milieu des citoyens électeurs, des contradictions ; la recherche inconsciente d’un contact véritable, d’un contact humain, d’un lien vivant, la destruction de tous les obstacles à l’amour, au corps. Ils se rappellent cela dans leur solitude.
Mais nous n’avons le temps que de signaler les influences les plus flagrantes, qu’on peut résumer sous le nom de « Influences de la Tour Penchée ». Ce qui veut dire que si vous voyez dans ces citoyens républicains de gauche, dans ces partisans inconditionnels du bulletin de vote, des gens pris au piège dans une tour penchée d’où ils ne peuvent descendre, vous comprendrez mieux bien des choses qui dans leur choix vous laissent embarrassés. On s’explique leur contestation du libéralisme et la société de classes, et aussi que cette contestation garde une grande tiédeur. Ils aiment cette société qui les moleste. Ils renouvellent à chaque élection le pacte républicain qui les piège. Ils sont les seuls responsables de cette situation qui les englue et on s’explique aussi le ton pédagogique, didactique, le ton de haut-parleur qui domine leur discours. Tout est un devoir, même l’amour. Pourtant, ils se sentent obligés de prêcher, sinon par leur vie, du moins par leurs justifications démocratiques, le caractère sacré du droit de vote ; ils évangélisent à tour de bras par leurs discours civiques, par leur expérience du renoncement à eux-mêmes ; ils annoncent la venue prochaine d’une société où tous seront sans doute libres, mais raisonnablement égaux, raisonnablement libres, c’est à dire jamais assez libres, jamais assez égaux.
Tout ceci explique pourquoi le citoyen, l’électeur au drapeau de gauche, à la bannière d’extrême gauche, a été forcé d’être lui aussi un bouc émissaire. Si la « politique » est une réalité, la tour d’ivoire est un moyen de fuir « la réalité ». Cela explique le curieux langage bâtard dans lequel leurs justifications sont confinées. Ce n’est pas le beau langage de la vérification pratique, de la conscience du refus, ce n’est pas non plus le langage du pouvoir. C’est entre les deux, entre sacrifice et créativité, entre radicalité et réformisme, entre appréhension et révolte. Le citoyen est un habitant des deux mondes, l’un qui meurt, l’autre qui lutte pour naître.
Et nous en arrivons à ce qui est sans doute la tendance la plus marquée (celle qui s’échappe malgré la perversion du civisme) des citoyens de la tour penchée : le désir d’être complet, d’être humain, de trouver l’état d’insurrection et de liberté – leur désir nostalgique de se retrouver en entier s’infiltre entre les tours ; ils cherchent la grâce de partager les rêves de leurs semblables, de vivre des émotions qui ne soient pas uniformes, de n’être plus isolés et surélevés dans la solitude de leur tour mais d’être en bas, sur la terre, avec la masse des humains aux prises avec la vraie guerre.
Aucune autre génération de citoyens ne s’est trouvée dans de telles conditions. Nulle autre, peut-être, ne s’est trouvée devant le possible d’un dépassement si effroyablement difficile. Ces citoyens n’ont rien de stable à regarder, rien à espérer, tout bouge autour d’eux nous l’avons vu. Pendant toutes les années de gauche ou d’extrême gauche, où ces électeurs furent le plus sensible aux influences, ils ont été conditionnés à se nier, à ne jamais lutter par eux-mêmes, la subjectivité véritable étant interdite, la révolte impossible, ils ont été poussé à ne jamais prendre conscience d’eux-mêmes, de leur classe, de ce qui change, de la nuit qui tombe autour d’eux, de la mort proche. Ils ont toujours délégué à d’autres. Leur esprit intérieur est paralysé.
Cependant s’ils ont manqué de pouvoir créateur, de cette créativité qui créé la vie, de cette « insurrection érotique » nécessaire à toute prise d’armes contre le sacrifice, ils détiennent toujours le pouvoir de refuser les compromis citoyens, l’ennui républicain, la soumission. Cela aussi leur a été imposé par les circonstances. Quand tout bascule autour de vous, le seul être qui reste relativement stable c’est vous-même. Quand tous les visages changent et s’obscurcissent, le seul visage qu’on peut voir clairement, c’est le sien propre. Ils peuvent donc se voir, et songez combien il est difficile de dire la vérité sur soi-même – la vérité désagréable ; d’avouer qu’on est médiocre, vaniteux, mesquin, déçu, malchanceux, qu’on souffre.
La prochaine génération héritera peut-être d’eux, tout un état d’esprit, une conscience de soi qui ne sera peut-être plus paralysé, équivoque, divisé. Ils hériteront peut-être de cette inconscience qui comme nous l’avons suggéré (n’est ce qu’une suggestion ?), est nécessaire au citoyen, à l’électeur républicain de gauche pour pénétrer au-dessous de la surface du monde et prendre conscience, qu’au-delà de la reddition, existent des rêves qu’on peut réaliser, que ces rêves ne sont pas seulement des nuages sucrés qu’on imagine lorsqu’on est seul. Pour ce grand don de la conscience, la génération prochaine devra remercier la subjectivité prisonnière et l’aliénation au travail des citoyens, des électeurs de gauche et d’extrême gauche, de tous ceux qui ont contribué à la réussite du pacte républicain, de ceux qui sont volontairement prisonniers de la Tour Penchée.
24 mars 2011