Voici des bribes d’un dialogue mené avec deux militants et publié sur le site de Mondialisme.org
Passionnant, loin du langage militant traditionnel
Pour caractériser exactement ce qui s’est passé, nous disons qu’il s’agit d’un soulèvement populaire : ce n’est pas une révolution dans le sens traditionnel c’est -à-dire strict et plein du terme. Ce qui s’est passé est comparable aux intifadas, aux soulèvements, aux révoltes qui se sont déroulées dans les territoires occupés dans les années 90 du siècle passé. C’est donc un mouvement populaire qui vise la démocratie, les libertés fondamentales et la satisfaction de revendications sociales : les dimensions politiques et sociales sont imbriquées, enchevêtrées
[...]
Pensez-vous que la situation pourrait déboucher sur une révolution telle que vous la définissez ?
Ce sont les gauchistes qui pensent comme ça... Ils disent qu’il faut insister, qu’on doit continuer la mouvement jusqu’à la victoire finale – avec des accents qui rappellent celle des bolcheviques... Et c’est ce qu’ils sont en train de faire maintenant. Mais ce n’est pas une révolution : c’est un soulèvement populaire qui a débouché sur des acquis : l’éviction du grand dictateur et de sa famille, la découverte du niveau de corruption qui a caractérisé le pouvoir tunisien, des luttes au sein des entreprises pour évincer les responsables corrompus. Il y a donc un mouvement général de conquête de liberté qui ne se limite pas à la liberté de former des partis, la liberté de la presse, etc. mais qui s’étend jusqu’à la liberté même au sein des entreprises, des administrations, etc. Tout le monde maintenant s’est libéré de ce blocage qui a été imposé par la dictature et a été entretenu depuis maintenant 54 ans - parce qu’il ne s’agit pas que de l’ère Ben Ali, c’est-à-dire le parti unique aux commandes, l’Etat-parti qui surplombe tout, etc..
[...]
Ce qui est paradoxal c’est que les staliniens d’ici appellent les gens, dans leurs tracts, à se constituer en conseils populaires : c’est complètement en contradiction avec leurs discours et leur idéologie. Ce sont des loups : ils peuvent aider à ce que se constitue de tels comités, mais pour se les accaparer ensuite à leur profit : on l’a déjà vu dans l’histoire... Mais de toute façon, ils n’ont pas la possibilité de la faire, ni la clairvoyance nécessaire. En tout cas, d’ici un mois, les choses vont se clarifier : l’idée centrale qui émane de la population, c’est que ce soulèvement est le nôtre et on ne veut pas qu’il soit récupéré par les partis. Déjà c’est un acquis important. Quant à la récupération, tout le monde est contre, qu’elle vienne du pouvoir ou des opposants. Pour nous, ces positions vont dans le sens d’une démocratie directe, en tous cas, ce sont les prémisses. Nous allons continuer à oeuvrer en ce sens en tous cas.