Divergences Revue libertaire en ligne
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Raoul Marc JENNAR
Fidèle à moi-même
Article mis en ligne le 25 décembre 2006
dernière modification le 9 décembre 2006

Des dizaines de messages me demandent de m’expliquer sur mon retrait du Collectif national pour une alternative antilibérale de gauche et des candidatures unitaires et du groupe provisoire de porte parole.

Je suis très touché, même si dans certains cas, ces messages prennent l’allure d’une quasi mise en demeure de m’expliquer. Je ne suis qu’un simple citoyen qui ne sollicite rien et qui n’a de compte à rendre qu’à sa conscience et à celles et ceux qui accordent du crédit à ses propos. C’est à ces derniers que je m’adresse.

Je l’ai fait pour rester en ordre avec la démarche de toute une vie. Je ne suis pas un professionnel de la militance politique. L’engagement n’a jamais été pour moi synonyme ni d’allégeance aveugle, ni d’incohérence entre le dire et le faire. Une structure politique, quelle qu’elle soit, n’est jamais à mes yeux qu’un outil remplaçable. Ce ne peut être en aucun cas une fin en soi. En politique comme en philosophie, je ne suis pas un croyant et ma démarche n’est pas celle du fidèle qui suit religieusement. J’ai été élevé dans l’exigence d’une libre pensée critique. J’entends y rester fidèle.

Je ne me suis plus senti en phase avec une structure dont la raison d’être est de rassembler et qui rassemble moins que lors de la campagne contre le traité établissant une Constitution pour l’Europe. Au niveau national et, dans un nombre trop important de cas à mes yeux, au niveau local. Je n’ai pas retrouvé, en nombre suffisant, ces femmes et ces hommes, totalement désintéressés, qui ne sont pas les exécutants d’un appareil, qui n’ont pour eux-mêmes aucun « plan de carrière » et qui faisaient la richesse des collectifs du « non » de gauche. La perspective du succès attise des appétits qui se dissimulent à peine. Et on assiste à la course aux médias et aux artifices de la communication de la part de personnes qui, en même temps, se disent hostiles à la présidentialisation du système politique et à la personnalisation des enjeux.

Je ne me suis pas senti à ma place dans une structure où le poids des appareils reprenait le dessus alors que nous avions si bellement réussi à l’atténuer dans l’exercice inédit de rédaction collective d’un authentique projet alternatif. Je n’éprouve aucune attirance pour les parties de bras de fer auxquelles se livrent entre eux, souvent avec délectation, des militants de partis politiques. Ces jeux-là ne sont pas les miens. Ils n’attirent pas non plus les centaines de militants du 29 mai qui se tiennent aujourd’hui à l’écart des collectifs pour une alternative unitaire. Ce constat est à l’origine de ma décision.

Fidèle à Pierre Bourdieu, je me suis efforcé d’être, pendant la campagne contre le traité européen, un « chercheur-militant ». J’entends le rester. Sans aller au-delà où de toute façon je n’ai rien à apporter.

La démarche entreprise est une œuvre humaine. Donc ardue. Je le sais. Elle exige d’énormes efforts. De tous certainement, et sans doute même un peu plus de ceux qui appartiennent pleinement et fièrement à une tradition politique. J’en conviens. Et il m’est arrivé de calmer des impatiences qui refusaient de prendre en compte cet aspect de nos difficultés.

L’attente est grande et forte. A la mesure des enjeux. Elle ne peut être déçue. A ma manière, avec le seul moyen de pression à ma disposition, j’ai voulu le rappeler. Une immense espérance est née le 29 mai. J’entends y rester fidèle et je refuse de participer à tout ce qui pourrait la dévoyer. Je ne quitte pas le combat. On me retrouvera là où je peux être le plus utile : dans le travail d’explication au plus près des gens. Si, d’ici là, des logiques contraires contre lesquelles je suis impuissant n’ont pas tué l’espoir.

Mosset, le 14 novembre 2007


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