Miguel Brieva publie régulièrement ses cartoons corrosifs en Espagne, notamment dans le quotidien El País. Son style graphique, fondé sur la parodie et le détournement, est un mélange insolite de Magritte et de Crumb, de Glen Baxter et des comic books étatsuniens des années 1960.
Son propos est une charge malicieusement philosophique contre un monde uniforme et laid, gouverné par l’argent roi, l’argent fou, l’argent homicide — devenu l’unique et très ténébreux objet de tous les désirs.
Brieva moque au passage l’infraculture audiovisuelle qui standardise les cerveaux et bride les sens pour que règne l’abstraction monétaire.
L’humour décapant de Brieva se fait au fil des pages volontiers surréaliste, délicieusement pince-sans-rire ou parfois hénaurme… Mais jamais vulgaire — la vulgarité est d’ailleurs l’une de ses cibles de prédilection. Il a su créer son propre univers, sorte de reflet caricatural du paradisiaque supermarché mondial dont l’infernale vérité est la course au « bénef » ou à la survie — et où la bêtise joue à plein son rôle effroyable dans l’histoire humaine.
Car Brieva excelle à déceler le bouffon qui sommeille en tout tyran.
La publication de ces tranches de satire en France, cette année, tombe à pic : la succession des crises financières et l’accélération du désastre écologique donnent largement raison à leur auteur…
Et quand tout va mal, Brieva, en ridiculisant les petits Ubus de la phynance et les néo-Nérons de la planète asphyxiée, prend le parti d’en rire.