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Un guide méchant [et parfois moche] de Paris : le grillon du métro
Station Assemblée Nationale
Jean-Manuel Traimond. Photos Christiane Passevant
Article mis en ligne le 16 avril 2009
dernière modification le 6 mars 2009

L’aspirateur géant de la RATP

L’un des charmes du métro parisien réside dans la présence du grillon, insecte aimable et aimé autant que l’abeille ou la coccinelle. Comme cette dernière, on le croyait signe de Dieu ; les folkloristes ont noté l’appellation « petit cheval du bon Dieu » et la croyance en l’impossibilité pour les boulangers de faire faillite, parce que le grillon aime la chaleur de leurs boulangeries. Le Grillon du Métro, de Pierre Bérenger-Lévêque et Claude Ovtcharenko (Boubée), en déduit ceci quant à sa présence dans le métro : « Y chasse-t-il les mauvais esprits hors des galeries ? Couvre-t-il le réseau des transports parisiens d’un bonheur égal à celui qu’il dispensait autrefois ? Y figure-t-il l’envoyé de Dieu ? »

La lecture de cette brochure suggère cependant des comparaisons entre le grillon et le député. Imaginons par exemple que l’on remplace dans le texte qui suit grillons par députés, chaleur par financement électoral et ballast par hémicycle _ et les lecteurs anglophones se souviendront, à propos des rames, des mots américains gravy train ; gravy signifiant jus de la viande, ou sauce brune, le gravy train est le train de jus, le profit que les hommes politiques tirent de leurs positions.

« Les grillons domestiques sont thermophiles : ils n’habitent que les seuls endroits où stationnent les rames, que les arrêts soient brefs comme dans les stations, ou prolongés comme sur les voies de garage, car le sol est suffisamment réchauffé pour les retenir sur les voies. » « Le ballast, haut par place d’une huitaine de centimètres, se compose de roches éruptives, détritiques et métamorphiques. Toutes se désagrègent lentement et produisent à long terme un substrat fait de particules de plus en plus fines, semblable à du poussier et sur lequel circulent les grillons. Ces roches, en même temps qu’elles conservent et diffusent la chaleur, apportent à ceux-ci intimité et sécurité. »

Notre second extrait éclairera plus d’un lecteur quand au sens vivant de la solidarité entre hommes politiques français.

« L’atmosphère locale engendre chez les grillons un fort besoin de substances nutritives humides. Il arrive que certains croisent un fruit ou une denrée fraîche cuisinée, mais la plupart se contentent de beaucoup moins, ne serait-ce que parce que l’aspirateur géant de la Régie hante et nettoie les voies la nuit. Des miettes tombées des bouches les plus gourmandes, de menues particules d’origine organique et qui achèvent là leur itinéraire : feuilles d’arbres sèches et cassantes, mégots, bouts d’allumettes, brins de laine, coins de papier, bris d’aliments secs… constituent l’ordinaire des grillons à tous les âges. (…) La faible teneur en protéines de ces substances est compensée par l’apport des exuvies, et surtout des cadavres frais des vieux grillons, entièrement consommés. » [1]


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