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Jacques Langlois
Que faire ?
solutions pour juguler la crise et surtout rabioter le système capitalisto-fiancier
Article mis en ligne le 29 janvier 2009
dernière modification le 31 janvier 2009

Que faire (dixit Lénine) face à la crise ?

Déjà agir à court terme pour ne pas rafistoler le système capitaliste, c’est-à-dire laisser à la phynance la possibilité de devenir folle et au capitalisme de tout dominer par l’argent. Comme l’avait génialement vu Proudhon la seule chose qui intéresse le capital, productif ou financier, qui ne sont que des compères, c’est le fric, la maximisation du fric. C’est là qu’il faut agir : saboter le tiroir-caisse, contre les incitations publicitaires et autres manipulations managériales et gouvernementales. Ici on va se contenter de changements fondamentaux pour éradiquer le capital.

Les individus lambda doivent retirer des banques toutes leurs liquidités disponibles et non soumises à des prélèvements automatiques ou forcés. Il ne faut laisser aux banques que la gestion desdits prélèvements (frais de gestion), sans leur abandonner le fric disponible à titre gratuit. Le vulgum pecus doit en même temps faire la grève de tout achat de bien durable ou non indispensable sauf cas de force majeure. Les grèves, au lieu d’emmerder l’usager, doivent enlever des ressources financières aux patrons publics ou privés. Il faut frapper le capitalisme là où cela lui fait mal, à la caisse. Dans tous les cas où un besoin serait indispensable à satisfaire, il faut privilégier le troc ou l’occasion (vive internet) notamment contre un service en paiement du bien nécessaire. Chaque fois que cela est possible, compte tenu de la distance, il faut remplacer les transports dits publics ou la bagnole par l’usage du vélo. Réduisons l’usage du téléphone portable à l’indispensable. Ne regardons plus la télé, n’achetons plus les journaux, du reste passant leur temps à propager l’idéologie libérale, et montons des spectacles vivants dans les rues. Etc. Cela ne montre que des exemples. L’idée générale est de consommer le moins possible dans tous les domaines au moins pendant un an. Cela fera du chômage, me direz-vous. Tant mieux. Il faudra alors que les pouvoirs publics réagissent et cela montrera à l’évidence comment les petites gens passent leur temps à se tuer pour vivre une vie qui ne mérite pas d’être vécue, où l’avoir remplace l’être, où la compétition supplante la coopération, où la charité compense l’absence de solidarité. Le slogan libéral est « munissez vous » ; la grève de la consommation inutile lui substituera « unissez vous ».

Certes, la grève de la consommation ne suffira pas à abattre le système puisqu’il faudra quand même acheter le nécessaire. Cependant, ladite grève portera un coup mortel au capital. Mais celui-ci pourrait trouver d’autres solutions de type fasciste ou nazi. Il faut donc aussi proposer des solutions viables à plus long terme qui évitent de sombrer dans le totalitarisme ou la « gouvernance » non-démocratique qui actionne les évolutions actuelles de l’Europe. Il faut aussi s’organiser dans des structures militantes pour exiger un autre mode de fonctionnement qui respecte les hommes, les groupes, la nature, qui installe le primat de la loi corrigeant les inégalités, qui restaure le principe de traitement d’égale considération effective des personnes et des communautés. Pour ce faire, il faut établir une ligne politique claire, a contrario des palinodies socialistes ou du révolutionnarisme trots –« kyste ». Ces exigences sont de moyen terme et n’excluent pas la disparition à plus long terme du système capitaliste et de l’Etat classique, unitaire et centralisé, situé au-dessus de la société civile, cela même pour quoi les anarchistes militent. Mais il faut être patient et tenir compte de ce que les populations ne sont pas prêtes immédiatement pour une révolution sociale.

Au plan financier, il faut que la collectivité retrouve ses pouvoirs régaliens : la banque centrale redevient publique et fait des avances à la nation, sans faire payer des intérêts et sans qu’il y ait d’emprunts publics au profit de riches prêteurs. Par ailleurs est créée une « banque du peuple » qui produit une monnaie de circulation et de crédit fondée sur la production réelle et les échanges entre partenaires socio-économiques, déjà pour financer le tiers secteur social, l’artisanat, les PMI et PME. Il est interdit à toute banque de dépôt d’avoir des filiales financières ou d’affaires. Le crédit que peut accorder une banque de dépôt ne peut excéder plus de 500 % de ses fonds propres et 200 % de ses dépôts. Les produits dérivés sont interdits de même que la titrisation des créances et les opérations à découvert et autres achats à terme ou options. Les normes comptables n’enregistrent que la valeur réelle des actifs (prix d’achat moins amortissements) et non les valeurs boursières, lesquelles ont permis des spéculations éhontées. Les LBO sont interdits. Les rachats de ses propres titres par une entreprise ou l’achat d’une autre maison avec des actions de l’entreprise achetante, sans apport de cash, sont aussi interdits de même que les fusions par échange d’actions. Les mouvements de capitaux sont taxés lourdement (taxe hyper Tobin). Les transferts illicites font l’objet de très lourdes peines de prison, notamment toute transaction via des paradis fiscaux (à proscrire). Les stock-options et autres parachutes dorés sont éliminés des rémunérations des cadres dirigeants. Les crédits revolving et les cartes de crédit à 20 % de taux d’intérêt sont proscrits. Les agences privées de notation sont remplacées par des organismes publics d’évaluation. Le taux légal d’usure est fixé à 8 %. Le taux d’intérêt réel (après déduction de l’inflation) du livret A est fixé à 4 %. Il est créé une vraie instance de surveillance de la finance et munie de moyens de contrôle et de sanction sur les banques, les assurances et les sociétés cotées. Toutes les niches fiscales sont supprimées.
Au plan économique national, les associations productives, les coopératives de production et de consommation, les mutuelles, les associations d’insertion sociale, les assurances sociales font enfin l’objet d’un droit qui les encourage et d’un financement (par la banque du peuple) assuré. Les bénéfices réinvestis pour la recherche et l’investissement sont exonérés d’impôts en tout genre. Les profits non réinvestis sont taxés à 75 %. La publicité est interdite sous toutes ses formes. Les assurances sont socialisées et fédérées dans un organisme unique coordonnant leurs activités. La « police » des échanges (Proudhon) est surveillée et établie par un organisme indépendant avec un conseil d’administration regroupant toutes les forces sociales intéressées à la clarté et à la justice des transactions. Les ports, docks, entrepôts, silos, magasins généraux, expositions, établissements de mercuriales, de barèmes et de statistiques, etc. sont socialisés. Les « biens communs » (pas publics car pourquoi l’Etat en aurait-il le monopole ?) : eau, électricité ou de façon plus générale énergie, poste, rail, routes, éducation, assurances, protection de la nature, etc. sont socialisés et fédérés.

Au plan social. Les subventions et exonérations de taxes sociales au profit des entreprises (65 milliards dont 24 pour les exonérations de cotisations sociales en-dessous de 1,6 SMIC et pour les heures sup en 2007) sont supprimées. Les salaires sont indexés sur les progrès de productivité. Le patronat est éliminé de la gestion du 1 % logement et des 28 milliards de la formation professionnelle continue. Les substitutions de plans d’épargne d’entreprise ou autre intéressement aux salaires sont supprimées. L’échelle mobile des salaires sur l’inflation est rétablie. Il n’ya que deux contrats de travail : le CDI et le CDD limité aux remplacements temporaires, aux pointes d’activité et aux travaux saisonniers, ce qui sera à contrôler avec une vraie inspection du travail indépendante du gouvernement. Le temps partiel est interdit et l’intérim est cantonné aux taches provisoires. Des organismes publics sont mis en place pour instituer des emplois à temps plein avec statut et formation, notamment dans les services aux personnes, avec répartition de l’activité entre plusieurs utilisateurs répertoriés et institués pour assurer statut, formation et emploi à temps plein.
Toute personne ou famille reçoit un revenu compensatoire destiné à lui assurer une vie digne dont le coût est évalué par une instance statistique indépendante. C’est pourquoi l’INSEE est retiré du ministère des finances pour être socialisé en mains communes entre tous les utilisateurs. Les agences immobilières sont concurrencées par des organismes municipaux payés à l’opération et non en fonction d’un taux appliqué sur la valeur du bien. Les hypothèques gouvernementales ne sont plus fonction de la valeur du bien : c’est un coût forfaitaire de gestion. Les pollutions sont payées par les pollueurs sous forme de taxes-carbone, ou autres, non « répercutables » dans les prix de vente, par taxation des bénéfices. Il est institué un fonds global de participation des entreprises à la couverture des risques environnementaux et d’indemnisation des pollutions et autres nuisances par une taxe additionnelle sur les bénéfices. Des subventions aux économies d’énergie sont instaurées pour le secteur domestique, financées par des taxes sur les grosses consommations d’eau, d’électricité, de gaz et autres. Tout citoyen se voit attribuer une tranche de consommation gratuite sur ses consommations, d’eau, d’électricité, de gaz. Par exemple, les 100 premiers kilowattheures sont gratuits ou 20 mètres cube d’eau par an ; tout ce qui les excède est lourdement taxé.

Au plan de la santé, les médecins sont payés à la capitation, les brevets et autres royalties des laboratoires sont limités à 5 ans, la production de médicaments génériques est organisée par la Banque du peuple et contrôlée par une fédération des assureurs mutualistes, les hôpitaux sont gratuits (hors frais de nourriture limités à ceux d’une cantine scolaire), la prévention est gratuite. Les organismes de contrôle des produits, aliments, produits chimiques, procédés, nuisances, pollutions, etc. sont regroupés et socialisés hors gouvernement et lobbys. Les assurances privées sont concurrencées par d’authentiques mutuelles financées par la Banque du peuple. La pharmacie devient un service de fourniture d’un bien commun socialisé. La recherche socialisée est développée via son financement par la banque du peuple.
Au plan éducatif, chaque enfant reçoit une dotation en fonction de son âge et de son degré d’études (salaire étudiant), dotation incluse dans le revenu imposable des parents. Les établissements sont territorialisés (carte scolaire) et évalués de même que les professeurs. Les internats sont restaurés et gratuits pour les enfants défavorisés. Les cours dogmatiques sont remplacés par des moyens d’auto-éducation (bibliothèques, pédagothèques, moyens d’accès à internet), des ateliers de résolution de problème en groupe, des cours-répétition. Les salles d’études de 5 à 7 heures sont restaurées et assistées par des conseillers et des répétiteurs. Les universités sont polyvalentes et regroupées. Elles assurent une mission de recherche pour la moitié du temps des professeurs, en liaison avec les grands organismes publics de recherche. Elles sont gratuites et sélectives à partir du niveau fin de DEUG. Elles organisent, en contrepartie de la sélection, des passerelles entre les différents niveaux et domaines d’enseignement. Les évaluations et orientations des élèves vers les filières éducatives sont assurées par des organismes multipartites extérieurs à l’Education nationale.

Au plan international, notamment en économie, la France partage son droit de veto à l’ONU avec les pays émergents auxquels elle s’associe. Elle supprime son armée et consacre les sommes ainsi économisées à la coopération avec les pays les moins avancés (PMA) ; les jeunes sont soumis à un service international en coopération. La France crée une banque du peuple mondiale qui émet une monnaie assise sur les matières premières et alimentaires. La France développe à fond la coopération et l’assistance aux PVD et PMA. Elle encourage ces pays à mettre en place des barrières douanières pour protéger leur agriculture vivrière et leurs industries locales. Elle renonce à ses subventions pour sa propre agriculture, tout en finançant cette dernière par une aide aux agriculteurs et non à la production. Elle milite pour l’interdiction des agro-carburants (maïs, soja, huile de palme, betterave sucrière, canne à sucre, etc.). Elle refuse toute ingérence dans les pays en guerre civile ou prétendus terroristes. La France met en place des taxes sur les importations de façon à compenser les différentiels de droits fiscal, social, environnemental. Ces taxes sont restituées aux PVD pour qu’ils améliorent leurs législations en ces domaines. Dans le cas des pays spécialistes du moins-disant en toute matière (USA, G-B, Irlande, etc.) ces taxes sont conservées.

Au plan européen, la France exige une harmonisation des politiques sociales, fiscales et environnementales ; elle demande une coordination économique, financière et monétaire dans l’UE ; elle veut que la BCE soit avant tout un moyen d’investissement soumis au pouvoir politique commun ; elle exige une mutualisation des moyens militaires réduits à des forces de pacification et de coopération ; elle demande une politique globale pour l’agriculture et la sauvegarde des espaces naturels ; elle réclame la fin des paradis fiscaux européens (Andorre, Luxembourg, Monaco, Lichtenstein, Iles anglo-normandes, City de Londres et ses annexes aux Bahamas et ailleurs), Irlande. En cas de réponse négative, elle se retire de cette UE hyper libérale propulsée notamment par des prétendus socialistes (Delors, Lamy, DSK et consorts). N’oublions pas que la Grande-Bretagne, en fait, n’est pas dans l’UE ; elle n’y est que pour favoriser ses intérêts comme 1ère place financière mondiale et petit toutou des USA, que l’Allemagne joue perso et reporte ses problèmes sur les autres pays, etc. etc. la France n’a pas besoin de cette Europe-là. Elle peut largement vivre sur elle-même si on élimine les prédations du capital financier ; elle a de tout sauf du pétrole, lequel peut être compensé par le bon usage de sa biomasse et de son agriculture. Et, grâce à sa coopération avec le Tiers-Monde, elle peut trouver les débouchés qu’elle perdrait en Europe. A supposer qu’elle en perde, car se retirer de l’UE institutionnelle n’implique pas de s’extraire de la zone de libre-échange qu’elle est en réalité, zone dont l’avantage est que tout le monde se tient par la barbichette.

Il y aurait bien d’autres domaines à définir pour une politique ni marxiste, ni libérale, ni social-démocrate. Coupons en là et n’oublions pas la ligne directrice : en finir avec le modèle du capital économico-financier, le libéralisme politique indépendant de l’économie et la fausse démocratie représentative.